La responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis en droit français


C- La responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis
                                                     
C’est une responsabilité du fait d’autrui prévu aux alinéas 6 et 7 de l’art 1242. Ces alinéas prévoient que les artisans sont responsables du dommage causé par leurs apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance. A moins qu’il ne prouve qu’il n’a pu empêcher le fait qui donne lui à cette responsabilité. Cette responsabilité des artisans est un héritage du 19ème siècle et aujourd’hui cette responsabilité est peu appliquée en jurisprudence. Prévu à l’al 6 de 1242 les rédacteurs du code civil ont présenté cette responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis parallèlement à celle des instituteurs du fait de leurs élèves puisque celle-ci figure au même alinéa. Cette mise en parallèle prend fin en 1937 quand la responsabilité des instituteurs a été modifiée. La responsabilité des artisans a mal vieilli car la jurisprudence ne l’a pas faite évoluer depuis sa rédaction dans le code civil à la différence de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants qui a beaucoup évolué. Au 19ème l’apprenti était accueillis chez l’artisan qui devait un père de substitution. On comprend pourquoi l’artisan avait une mission de surveillance particulière et même une mission d’éducation de l’apprenti mais aujourd’hui se rapport artisan/apprenti est devenu purement professionnel. Le régime de responsabilité de l’artisan du fait de son apprenti n’a pas fait l’objet d’évolution en jurisprudence.

1- Le régime de la responsabilité

Encore aujourd’hui comme autrefois le cas de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants, la responsabilité des artisans repose sur une présomption de faute. Par conséquent les artisans peuvent s’exonérer en prouvant qu’ils n’ont pas commis de faute. Dans le cas de la responsabilité des artisans celle-ci ne cesse pas à la majorité de l’apprenti. Ce fondement n’est pas très logique si on maintien le parallèle avec la responsabilité des parents l’évolution de ce régime aurait de l’être étendu à celui des artisans et donc retenir à leur égard une responsabilité de plein droit ceci aurait eu l’avantage d’alinéa le régime de la responsabilité des artisans sur celui de la responsabilité des commettants. Il existe sur ce point une rupture entre doctrine et JP. La doctrine milite en faveur d’une extension de la solution de l’arrêt Bertrand au cas de la responsabilité de l’artisan cependant la jurisprudence n’a pas été saisi de cette question depuis 1997.

2- Les conditions

Il faut un artisan. Cette relation artisan/apprenti ce caractérise par une relation d’apprentissage mais il n’est pas nécessaire qu’il y ait un contrat. Cette relation se traduit par la charge de l’artisan de surveiller et d’enseigner le métier à son apprenti. Les juges en droit civil ne contrôlent pas l’existence d’une inscription au répertoire des métiers et ne contrôlent pas non plus que l’entreprise qui accueille l’apprenti correspond à la définition de l’entreprise artisanale. Cette souplesse est encore plus manifeste à travers une position de la cour de cassation qui a retenu que le non-respect des conditions de validité du contrat d’apprentissage n’était pas un obstacle à l’application de l’alinéa 6 de l’art 1242 CC : arrêt de 1943.
Il faut un lien de connexité entre la surveillance et le fait dommageable laisse présumer la faute de surveillance de l’artisan. Cet acte dommageable de l’apprenti est un fait illicite qui peut être une faute ou bien le fait de la chose dont il avait la garde. Acte commis sous la surveillance de l’artisan donc en principe pendant les heures de travail ou bien si exceptionnellement l’apprenti habite chez l’artisan alors la responsabilité de ce dernier est permanente. Les auteurs s’attachent à l’exigence d’un fait illicite de l’apprenti. Certains auteurs tendent à abandonner l’exigence de la faute de l’apprenti et donc à alénier les caractéristiques du fait dommageable de l’apprenti sur l’acte commis par l’enfant. En jurisprudence la condition de la faute semble être maintenue : cour de cassation 8/04/2004.
Peu importe que l’apprenti soit mineur ou majeur et pas de condition de cohabitation.

3- L’exonération de l’artisan

L’artisan peut s’exonérer de sa responsabilité en prouvant l’existence d’un cas de force majeur ou bien d’une faute de la victime. Puisque la responsabilité de l’artisan du fait de son apprenti repose sur une présomption de faute alors l’artisan peut s’exonérer de sa responsabilité en prouvant qu’il n’a pas commis de faute.

4- Les actions ouvertes à la victime de l’apprenti

La victime de l’apprenti dispose d’une option. Elle peut agir ou bien contre l’artisan sur le fondement de l’alinéa 6 ou bien contre l’apprenti sous le fondement de 1240 CC. L’apprenti est personnellement responsable de ses fautes mais comme il est souvent insolvable les victimes engagent la responsabilité des artisans qui est plus solvable. En principe on considère que les différentes responsabilités du fait d’autrui ne sont pas cumulatives mais alternatives. Ainsi avant l’arrêt Bertrand les régimes de responsabilité des parents et de l’artisan reposaient tous les deux sur une présomption de faute, seule l’une ou l’autre de ces responsabilités pouvaient être engagées. Depuis cet arrêt l’identité des fondements de responsabilité des artisans et des parents a été abandonnée et donc rien n’interdit de cumuler ces deux responsabilités.
L’application des régimes de responsabilité fondé sur l’alinéa 6 de 1242 (artisan et instituteur) est en déclin. La doctrine est favorable à leur disparition et il semble que se soit l’option qui ait été retenu par les projets de réforme de la RC. Pour la responsabilité des artisans même s’il est vrai que ceux-ci ne sont plus mentionnés dans le projet mais on a dans ce projet l’article 1248 qui prévoit que « les autres personnes qui par contrat assume à titre professionnel une mission de surveillance d’autrui répondent du fait de la PP surveillée à moins qu’elles démontrent qu’elles n’ont pas commis de faute ». Le projet de réforme n’a pas complétement suivi la position défendue par la doctrine puisqu’il maintient un régime de responsabilité reposant sur la présomption de faute et non sur une responsabilité de plein droit.

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