— Les droits complémentaires des expropriés
La procédure d’expropriation constitue, en elle-même, une garantie des droits des expropriés.
1. Existence et nécessité d’une utilité publique
2. Compétence exclusive de l’Etat pour décider s’il y aura ou pas expropriation
3. Intervention du juge judiciaire, qui prononce le transfert de propriété, et qui évalue la
valeur des biens expropriés (à défaut d’accord amiable)
4. L’extrême réglementation de la procédure, notamment pour l’adoption de la DUP et
de l’arrêté de cessibilité. Exigence d’avis, procédure consultative.
5. Une indemnité juste et préalable (même si défaut de réparation du préjudice moral).
Les autres garanties de l’exproprié
§ 1 — La demande de réquisition d’emprise totale
C’est la situation dans laquelle une expropriation ne porte que sur une portion d’immeuble
bâti ou une parcelle de terrain nu, ou encore d’une fraction d’exploitation agricole ; la partie
restante est trop exiguë pour être utilisée dans des conditions normales. Dans ces trois cas,
le propriétaire de la partie restante peut demander au juge de l’expropriation le transfert de
propriété de la totalité de l’immeuble ou de l’exploitation (art. L. 242-1 Code de
l’expropriation).
L’art. R. 242-1 fixe des conditions pour pouvoir utiliser ce droit (même si en général, il y a
accord amiable sur cette question) : une demande formulée dans le délai d’1 mois qui suit la
notification des offres ; cette demande doit ensuite être acceptée par le juge (qui va fixer le
montant de l’indemnisation d’expropriation pour la fraction prévue, plus le prix d’achat, pour
la partie en plus, car, pour cette partie, il n’y a pas eu expropriation, c’est l’exproprié qui désire
la céder).
§ 2 — Le droit de délaissement (art. L. 241-1 du code de l’expropriation)
Il faut éviter l’effet « Epée de Damoclès », une situation d’attente : l’expropriant a obtenu une
DUP, mais le préfet ne saisit pas le juge de l’expropriation ; l’exproprié ne peut pas profiter
de son bien, il ne peut pas le mettre en valeur, le mettre en vente. Le droit de délaissement
permet au propriétaire d’imposer à l’expropriant de poursuivre la procédure ou de
l’abandonner.
A partir du délai d’1 an après l’adoption de la DUP (publication), si l’expropriant n’a pas acquis
le bien, le propriétaire menacé peut mettre en demeure d’acquérir la personne publique au
profit de laquelle a été prise la DUP.
Le propriétaire futur exproprié doit saisir le préfet, et l’expropriant a 2 ans pour réaliser
l’acquisition (ou abandonner son projet). S’il laisse passer un délai de 2 ans (sans accord
amiable), l’exproprié peut alors, s’il y trouve un intérêt, saisir le juge de l’expropriation pour
que ce dernier prononce le transfert de propriété.
§ 3 — Le droit de rétrocession
Ce droit s’applique dans l’hypothèse dans laquelle, lorsque la procédure d’expropriation est
terminée, l’expropriant n’affecte pas le bien exproprié à la destination prévue.
L’art. L.421-1 prévoit que, dans ce cas, l’ancien propriétaire (ou ses ayant-droits à titre
universel, en cas de décès) dispose d’un droit de rétrocession.
Ce droit de rétrocession concerne également les immeubles acquis amiablement après DUP.
1/ Ce droit de rétrocession consiste tout d’abord en un droit de priorité (de rachat) au profit
de l’ancien propriétaire en cas de vente du bien par la personne expropriante.
L’expropriant qui décide de vendre un immeuble qu’il a acquis par expropriation (avec un
usage prévu par la DUP) méconnaît cette affectation (qui est une condition à son acquisition
forcée) ; il doit informer de son intention de céder le bien les anciens propriétaires et les
inviter à opter entre l’exercice immédiat de leur droit de rétrocession et la renonciation à ce
droit (« purge »). La renonciation à ce droit fait obstacle à toute revendication postérieure.
A défaut, l’expropriant engage sa responsabilité. Cependant, une demande de restitution ne
peut pas être formulée contre l’acquéreur du bien si l’expropriant a cédé ce bien sans
respecter son obligation d’informer de son intention de céder ; il n’y a pas de droit de suite
(le droit de rétrocession n’est pas un droit réel pesant sur le bien, mais un droit personnel qui
pèse sur l’expropriant). Il est également des cas où la cession du bien par l’expropriant est
destinée à permettre l’affectation prévue par la DUP ; la cession est d’ailleurs dès le départ
organisée (il n’y a pas dans ce cas lieu de « purger » le droit de rétrocession qui n’existe pas
dans cette situation).
2/ L’usage « spontané » du droit de rétrocession
Cela correspond à l’usage de ce droit dans les situations dans lesquelles il n’y a pas vente du
bien par l’expropriant, mais ce dernier ne respecte pas l’affectation à laquelle le bien est destiné
par la DUP. Les anciens propriétaires disposent dans ce cas du droit à la restitution de leur
bien.
Il ne s’agit pas d’une résolution de l’expropriation, mais d’une vente (imposée par le juge de
l’expropriation), avec un prix déterminé par rapport à la valeur du bien au jour de la
rétrocession et fixé, à défaut d’accord amiable, là encore par le juge de l’expropriation (sans
indemnisation en dédommagement des troubles causés à l’exproprié). Si un litige porte sur le
droit de rétrocession, le juge compétent est le juge judiciaire de droit commun.
Pour pouvoir bénéficier du droit de rétrocession :
• Il faut un délai minimum : 5 ans (à l’issue duquel il sera constaté que les biens expropriés
n’ont pas été affectés au but d’utilité publique prévu). Même si le délai de 5 ans n’est pas expiré,
l’ancien propriétaire peut aussi faire usage de son droit de rétrocession, à la condition que le
terrain exproprié soit utilisé pour un usage autre que celui prévu par la DUP et que cette
nouvelle affectation empêche définitivement celle prévue par la DUP (Cass. 3e civ. 19 février
1992, OPHLM de Pantin, n° 90-12652, AJPI 1992, p. 785).
• Il existe également un délai maximum, à l’expiration duquel la rétrocession ne peut plus être
demandée : 30 ans à compter de l’ordonnance d’expropriation.
Pendant ce délai, le bien exproprié doit, non seulement avoir été utilisé conformément à la
destination d’utilité publique prévue (ou les travaux doivent avoir « sérieusement
commencé(s) », mais il doit avoir aussi conservé cette affectation (l’affectation s’impose
pendant 30 ans). En effet, le droit de rétrocession peut également s’exercer s’il est mis fin à la
destination d’utilité publique qui a été donnée à l’immeuble (quel que soit le moment où elle
se produit, et jusqu’à ce que soit écoulé le délai de 30 ans).
Lorsque ce délai de 30 ans est expiré, le droit de rétrocession est dit « purgé », la commune
peut procéder à la vente du bien (après déclassement).
• Le droit de rétrocession peut être paralysé.
Il peut l’être partiellement, lorsqu’une partie seulement du bien exproprié a été utilisée
conformément à la DUP. Ce droit de rétrocession ne s’applique pas sur le reliquat, c’est-àdire sur la partie restante (même si cette partie restante reçoit une affectation différente de
celle prévue par la DUP).
Le droit de rétrocession est également mis en échec si une nouvelle DUP est prise, ou si
l’ancienne DUP est prorogée (même si la DUP intervient après la demande de rétrocession).
Sera néanmoins annulée pour détournement de pouvoir la DUP dont le seul objet est de faire
obstacle à l’exercice du droit de rétrocession de l’ancien propriétaire.
Le droit de rétrocession est enfin largement limité (voir même fictif) si un ouvrage public est
construit sur le terrain exproprié ; car on a longtemps considéré qu’un ouvrage public ne
pouvait pas être démoli, même s’il était réalisé illégalement (en l’occurrence, dans ce cas, sa
construction fait échec au droit de rétrocession, car l’ancien propriétaire aurait pu faire valoir
que l’ouvrage ne correspond pas à la DUP). Désormais, un ouvrage public peut être détruit si
l’intérêt général n’y fait pas obstacle, ce qui permet en théorie la rétrocession.
Si la rétrocession (c’est-à-dire la restitution) du bien n’est pas possible (parce que le bien a été
détruit, vendu ou qu’il a été construit un ouvrage public sur son sol), l’ancien propriétaire peut
bénéficier d’une indemnisation s’il a subi un préjudice financier (perte de la plus value de
l’immeuble).
La procédure d’expropriation constitue, en elle-même, une garantie des droits des expropriés.
1. Existence et nécessité d’une utilité publique
2. Compétence exclusive de l’Etat pour décider s’il y aura ou pas expropriation
3. Intervention du juge judiciaire, qui prononce le transfert de propriété, et qui évalue la
valeur des biens expropriés (à défaut d’accord amiable)
4. L’extrême réglementation de la procédure, notamment pour l’adoption de la DUP et
de l’arrêté de cessibilité. Exigence d’avis, procédure consultative.
5. Une indemnité juste et préalable (même si défaut de réparation du préjudice moral).
Les autres garanties de l’exproprié
§ 1 — La demande de réquisition d’emprise totale
C’est la situation dans laquelle une expropriation ne porte que sur une portion d’immeuble
bâti ou une parcelle de terrain nu, ou encore d’une fraction d’exploitation agricole ; la partie
restante est trop exiguë pour être utilisée dans des conditions normales. Dans ces trois cas,
le propriétaire de la partie restante peut demander au juge de l’expropriation le transfert de
propriété de la totalité de l’immeuble ou de l’exploitation (art. L. 242-1 Code de
l’expropriation).
L’art. R. 242-1 fixe des conditions pour pouvoir utiliser ce droit (même si en général, il y a
accord amiable sur cette question) : une demande formulée dans le délai d’1 mois qui suit la
notification des offres ; cette demande doit ensuite être acceptée par le juge (qui va fixer le
montant de l’indemnisation d’expropriation pour la fraction prévue, plus le prix d’achat, pour
la partie en plus, car, pour cette partie, il n’y a pas eu expropriation, c’est l’exproprié qui désire
la céder).
§ 2 — Le droit de délaissement (art. L. 241-1 du code de l’expropriation)
Il faut éviter l’effet « Epée de Damoclès », une situation d’attente : l’expropriant a obtenu une
DUP, mais le préfet ne saisit pas le juge de l’expropriation ; l’exproprié ne peut pas profiter
de son bien, il ne peut pas le mettre en valeur, le mettre en vente. Le droit de délaissement
permet au propriétaire d’imposer à l’expropriant de poursuivre la procédure ou de
l’abandonner.
A partir du délai d’1 an après l’adoption de la DUP (publication), si l’expropriant n’a pas acquis
le bien, le propriétaire menacé peut mettre en demeure d’acquérir la personne publique au
profit de laquelle a été prise la DUP.
Le propriétaire futur exproprié doit saisir le préfet, et l’expropriant a 2 ans pour réaliser
l’acquisition (ou abandonner son projet). S’il laisse passer un délai de 2 ans (sans accord
amiable), l’exproprié peut alors, s’il y trouve un intérêt, saisir le juge de l’expropriation pour
que ce dernier prononce le transfert de propriété.
§ 3 — Le droit de rétrocession
Ce droit s’applique dans l’hypothèse dans laquelle, lorsque la procédure d’expropriation est
terminée, l’expropriant n’affecte pas le bien exproprié à la destination prévue.
L’art. L.421-1 prévoit que, dans ce cas, l’ancien propriétaire (ou ses ayant-droits à titre
universel, en cas de décès) dispose d’un droit de rétrocession.
Ce droit de rétrocession concerne également les immeubles acquis amiablement après DUP.
1/ Ce droit de rétrocession consiste tout d’abord en un droit de priorité (de rachat) au profit
de l’ancien propriétaire en cas de vente du bien par la personne expropriante.
L’expropriant qui décide de vendre un immeuble qu’il a acquis par expropriation (avec un
usage prévu par la DUP) méconnaît cette affectation (qui est une condition à son acquisition
forcée) ; il doit informer de son intention de céder le bien les anciens propriétaires et les
inviter à opter entre l’exercice immédiat de leur droit de rétrocession et la renonciation à ce
droit (« purge »). La renonciation à ce droit fait obstacle à toute revendication postérieure.
A défaut, l’expropriant engage sa responsabilité. Cependant, une demande de restitution ne
peut pas être formulée contre l’acquéreur du bien si l’expropriant a cédé ce bien sans
respecter son obligation d’informer de son intention de céder ; il n’y a pas de droit de suite
(le droit de rétrocession n’est pas un droit réel pesant sur le bien, mais un droit personnel qui
pèse sur l’expropriant). Il est également des cas où la cession du bien par l’expropriant est
destinée à permettre l’affectation prévue par la DUP ; la cession est d’ailleurs dès le départ
organisée (il n’y a pas dans ce cas lieu de « purger » le droit de rétrocession qui n’existe pas
dans cette situation).
2/ L’usage « spontané » du droit de rétrocession
Cela correspond à l’usage de ce droit dans les situations dans lesquelles il n’y a pas vente du
bien par l’expropriant, mais ce dernier ne respecte pas l’affectation à laquelle le bien est destiné
par la DUP. Les anciens propriétaires disposent dans ce cas du droit à la restitution de leur
bien.
Il ne s’agit pas d’une résolution de l’expropriation, mais d’une vente (imposée par le juge de
l’expropriation), avec un prix déterminé par rapport à la valeur du bien au jour de la
rétrocession et fixé, à défaut d’accord amiable, là encore par le juge de l’expropriation (sans
indemnisation en dédommagement des troubles causés à l’exproprié). Si un litige porte sur le
droit de rétrocession, le juge compétent est le juge judiciaire de droit commun.
Pour pouvoir bénéficier du droit de rétrocession :
• Il faut un délai minimum : 5 ans (à l’issue duquel il sera constaté que les biens expropriés
n’ont pas été affectés au but d’utilité publique prévu). Même si le délai de 5 ans n’est pas expiré,
l’ancien propriétaire peut aussi faire usage de son droit de rétrocession, à la condition que le
terrain exproprié soit utilisé pour un usage autre que celui prévu par la DUP et que cette
nouvelle affectation empêche définitivement celle prévue par la DUP (Cass. 3e civ. 19 février
1992, OPHLM de Pantin, n° 90-12652, AJPI 1992, p. 785).
• Il existe également un délai maximum, à l’expiration duquel la rétrocession ne peut plus être
demandée : 30 ans à compter de l’ordonnance d’expropriation.
Pendant ce délai, le bien exproprié doit, non seulement avoir été utilisé conformément à la
destination d’utilité publique prévue (ou les travaux doivent avoir « sérieusement
commencé(s) », mais il doit avoir aussi conservé cette affectation (l’affectation s’impose
pendant 30 ans). En effet, le droit de rétrocession peut également s’exercer s’il est mis fin à la
destination d’utilité publique qui a été donnée à l’immeuble (quel que soit le moment où elle
se produit, et jusqu’à ce que soit écoulé le délai de 30 ans).
Lorsque ce délai de 30 ans est expiré, le droit de rétrocession est dit « purgé », la commune
peut procéder à la vente du bien (après déclassement).
• Le droit de rétrocession peut être paralysé.
Il peut l’être partiellement, lorsqu’une partie seulement du bien exproprié a été utilisée
conformément à la DUP. Ce droit de rétrocession ne s’applique pas sur le reliquat, c’est-àdire sur la partie restante (même si cette partie restante reçoit une affectation différente de
celle prévue par la DUP).
Le droit de rétrocession est également mis en échec si une nouvelle DUP est prise, ou si
l’ancienne DUP est prorogée (même si la DUP intervient après la demande de rétrocession).
Sera néanmoins annulée pour détournement de pouvoir la DUP dont le seul objet est de faire
obstacle à l’exercice du droit de rétrocession de l’ancien propriétaire.
Le droit de rétrocession est enfin largement limité (voir même fictif) si un ouvrage public est
construit sur le terrain exproprié ; car on a longtemps considéré qu’un ouvrage public ne
pouvait pas être démoli, même s’il était réalisé illégalement (en l’occurrence, dans ce cas, sa
construction fait échec au droit de rétrocession, car l’ancien propriétaire aurait pu faire valoir
que l’ouvrage ne correspond pas à la DUP). Désormais, un ouvrage public peut être détruit si
l’intérêt général n’y fait pas obstacle, ce qui permet en théorie la rétrocession.
Si la rétrocession (c’est-à-dire la restitution) du bien n’est pas possible (parce que le bien a été
détruit, vendu ou qu’il a été construit un ouvrage public sur son sol), l’ancien propriétaire peut
bénéficier d’une indemnisation s’il a subi un préjudice financier (perte de la plus value de
l’immeuble).
No comments:
Post a Comment