comment la décision du juge sera exécutée ?

 

Lorsque le plaideur a obtenu un jugement ayant force exécutoire (lire articles 501 et 500 du CPC), si l’adversaire s’obstine à ne pas exécuter ce jugement, le CPC d’exécution a prévu toute une série de règles dont l’ensemble constitue les voies d’exécution lesquelles sont des voies de droit mises à la disposition des créanciers pour leur permettre de recouvrer ce qui leur est dû, au besoin par la coercition. Les huissiers de justice pourront alors demander seule la mise en oeuvre d’une procédure de saisie au bénéfice de leur client. Cette discipline se caractérise par la contrainte qui lui est inhérente, il s’agit d’imposer au débiteur l’exécution d’une obligation qui de sa part aurait due être spontanée. La contrainte prend notamment la forme d’une saisie et peut impliquer l’intervention de la force publique, elle suppose toujours une pression légitime exercée sur le débiteur en vertu d’un ordre du souverain. A ce titre, les procédures civiles d’exécution relèvent du domaine de l’impérium (rechercher signification).

 

         Si l’on insiste sur le fait que le DJP tend à assurer la sanction des droits pv, on le considèrera comme une branche du droit pv et cette orientation n’est pas dépourvue de conséquences pratiques car elle commande dans une large mesure le rôle respectif du juge et des parties dans un procès civil. Ici, on laisse aux plaideurs le soin de diriger leur procédure, le juge n’étant chargé que d’arbitrer un duel entre les parties également maîtresses de leurs droits.

—> on dira alors que le procès est la chose des parties (lire article  4 alinéa 1er CPC).

         S’il apparait au contraire que l’objet du DJP est d’assurer le fonctionnement correct de la justice, on conférera au juge un rôle prépondérant inquisitorial en lui donnant le pouvoir de diriger la procédure. Le choix entre les deux systèmes n’est donc pas indifférent.

 

         Ainsi défini, le DJP présente particulièrement un caractère formaliste et un caractère impératif. D’abord un caractère formaliste car la matière, les formes et les délais occupent une place importante spécialement en procédure civile. La loi décrit avec minutie les formalités qui doivent être accomplies et les délais qui sont impartis au plaideur pour les accomplir, tous les auxiliaires de justice s’y soumettent. Ce formalisme est si rigoureux que parfois la violation des formes prescrites entraine non seulement la nullité de l’acte de procédure irréguliermaiscompromet aussi le fond du droit lui-même.

         Par exemple, c’est à peine de nullité qu’une assignation doit contenir un certain nombre de mentions (lire article 54, 56, 752 du CPC) et devant le TJ si cette assignation dont une copie doit être remise au greffe du tribunal dans le délai de deux mois suivant la communication de la date d’audience dans la juridiction ne l’a pas été, elle sera caduque (article 754 CPC).

         Par voie de conséquence, notre droit substantiel dont on réclame la sanction sera perdupuisque l’acte qui véhicule notre demande est caduque. Le fond du droit lui même est donc atteint.

         De la même manière, le plaideur débouté en 1ère instance qui veut interjeter appel doit le faire dans le mois de la notification du jugement qui lui a été faite par la partie gagnante (article 528 CPC) au moyen d’un acte particulier que l’on appelle la déclaration d’appel (article 900 CPC).

 

         Si les formes prescrites par la loi n’ont pas été observées (article 901 CPC) ou si le délai pour former appel n’a pas été respecté, la déclaration d’appel est nulle et assez souvent par ailleurs le délai d’appel d’1 mois étant entre temps expiré, avec lui disparaît la faculté d’exercer un recours de telle sorte que —> le plaideur débouté en 1ère instance sera définitivement condamné.

 

         Le formalisme reste toutefois une nécessité ca il est facteur de sécurité. En effet, le plaideur qui s’est plié aux formes requises est assuré de la conservation de son droit sans avoir à craindre une remise en cause de la portée de l’acte qui a été accompli.

 

                   Au demeurant, les inconvénients du formalisme ne sont pas sans remède, à supposer qu’une irrégularité ait été commise, toutes les formalités de procédure ne sont pas sanctionnées par la nullité. Celle-ci n’est pas automatique en procédure et ne doit être prononcée que si l’irrégularité a causé un préjudice, un grief à la partie adverse (article 114 alinéa 2 relatif à la nullité des actes de procédure pour vice de forme CPC).

 

         La procédure civile qui s’entend de la marche à suivre pour conduire le procèsdécrit lamanière dont les sujets de droit sont habilités à faire valoir leurs droits devant la justice civile. Elle concerne aussi la manière dont la justice est rendue, laquelle a reçu deux acceptions dans le CPC.

         La première a fait de la justice de la procédure une justice contentieuse de départition, on attend avant tout du juge qu’il dise le droit (article 12 alinéa 1er CPC) et qu’il départisse les plaideurs. Cette justice est contentieuse, elle suppose l’existence d’un litige et l’implication du droit par le juge à ce litige pour le trancher (article 12 CPC important ++).

 

         Depuis les dictions du nouveau CPC en 1976, la matière contentieuse ne représente plus la totalité de la procédure civile laquelle englobe aussi la matière dite « gracieuse » où le justiciable requiert du juge qu’il se prononce sur sa situation juridiquevia un contrôle et ce en dehors de tout litige (article 25 CPC). Cela ne correspond plus non plus à la totalité de la mission du juge qui est certes majoritairement chargée de statuer sur la contestation des parties mais aussi plus ponctuellement de l’inciter à y mettre fin en se considérant (article 21 CPC). La justice de la procédure tend donc à devenir aussi une justice de répartition et non plus de départition cherchant à allouer au justiciable leur droit d’une façon qu’ils estiment plus consensuelle, + soft.

 

         Quant à la procédure civile proprement dite, elle peut être comprise si on la compare à sa discipline la + voisine les procédures civiles d’exécution, mais aussi au travers de sa source essentielle sur le plan national, le CPC.

 

Procédure civile (PC) et procédures civiles d’exécution (PCE)

 

         La tradition historique a longtemps considéré les procédures civiles d’exécution comme un appendice de la PC, celle-ci étant considérée comme composée de 4 parties principales : la demande en justice, l’instruction du procès, le jugement et l’exécution du jugement. C’était précisément la force exécutoire attachée à tout jugement qui faisait le lien entre la PC et les PCE. Cette vision est exacte car la PC et les voies d’exécution ont pour trait commun de lever les obstacles qui entravent la réalisation des droits mais les entraves ne sont pas de la même nature. La PC a pour objet propre de mettre en place une réglementation destinée à trancher les constations et à dire le droit au moyen d’une décision juridictionnelle ayant autorité de chose jugée (articles 1355 du Code civil et 480 du CPC).

Les voies d’exécution interviennent elles en aval, en règle générale le droit a déjà été dit, l’objectif n’est donc plus de régler une situation litigieuse, il consiste à faire passer le droit dans les faits en contraignant le débiteur qu’il n’exécuterait pas spontanément le jugement qui le condamne au paiement.

Les méthodes des deux disciplines ne sont d’ailleurs pas les mêmes, la première réglemente la mise en oeuvre de la jurisdixio et pour cette raison elle tend à faire en sorte que les deux parties (demandeur et défendeur) soient entendu en leur prétention respective dans le cadre d’un débat mené sur un pied d’égalité et respectant le principe de la contradiction.

Le droit de l’exécution, lui, relève du domaine de l’impérium, c’est un droit d’autorité fondé sur la contrainte laquelle est nécessaire lorsqu’un débiteur ne respecte pas les obligations d’un titre exécutoire. Quelque soit la forme de la contrainte, matérielle ou juridique, directe ou indirecte, la relation créancier / débiteur est pour cette raison naturellement inégalitaire et à la différence de la PC, le droit de l’exécution n’a pas pour but de faire disparaitre cette inégalité au demeurant légitime puisqu’elle trouve son origine dans l’assujettissement créé par l’existence d’un droit à l’encontre d’un débiteur qui est tenu de s’y soumettre. Dans cette mesure, tout créancier peut donc contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard (article L111-1 du CPC d’exécution) et particulièrement tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur (article L111-2 CPC d’exécution) sachant que constituent des titres exécutoires notamment les décisions des juridictions de l’OJ (ordre judiciaire) ou de l’ordre administratif lorsqu’elles ont force exécutoire, les jugements étrangers et les actes notariés revêtus de la force exécutoire (article L111-3 premièrement, deuxièmement et quatrièmement du CPC d’exécution). Seuls peuvent procéder à l’exécution forcée et aux saisies conservatoires les huissiers de justice chargés par un monopole légal lié à leur qualité d’officier ministériel de l’exécution (article L122-1 du CPC d’exécution).

 

Source essentielle de la PC : le CPC

 

         S’agissant du CPC, l’idée fondamentale qui a porté la réforme de la PC en 71/75 a été de renforcer le pouvoir du juge civil d’une part dans le déroulement de l’instance en instituant une régulation judiciaire des délais, d’autre part dans la préparation juridictionnelle de l’audience des plaidoiries afin que l’affaire y arrive purgée de ses contestations incidentes latérales et que les débats portent sur les seules questions de fond. L’intention du nouveau CPC à l’époque a été d’instituer dans un échange avec les conseils (avocats) des parties une mise en état de l’affaire avec un juge de la mise en état et aux termes de l’instruction du dossier une ordonnance de clôture prononcée par le juge de la mise en état (articles 798 et 799 du CPC).

C’est en fonction de cette augmentation des pouvoirs du juge civil qu’on été élaborés les principes directeurs du procès des articles 1er à 24 du CPC dans le but d’affirmer expressément que le pouvoir du juge reste équilibré d’abord par un monopole reconnu aux plaideurs. C’est à eux que revient l’impulsion initiale du procès (article 1er CPC) mais aussi la charge d’alléguer les faits (article 6 CPC) ou encore la détermination de l’objet du litige par leur prétention respective (article 4 CPC), ce qu’on appelle s’agissant de ces deux derniers textes le principe dispositif. Mais, le pouvoir du juge a aussi été équilibré par des garanties fondamentales de bonne justice au premier rang desquels figurent les principes de la contradiction (article 15 te 16 CPC) et de la défense (article 18 et 19 CPC). C’est sur la base de cette architecture que le procès civil a été organisé et que l’office du juge, définie par les article 12 alinéa 1er et 16 aliéna 1 et 3, a pris sa place dans sa double dimension. En effet, à côté de la connaissance du droit qui a toujours été requise puisqu’on attend de lui qu’il le dise, le juge a aussi une connaissance du fait càd des faits qui dans le procès sont allégués par les parties à l’appui de leur prétention. Le fait en effet n’est pas la prérogative exclusive des parties (article 6 CPC) et le droit celui du juge (article 12 alinéa 1er CPC) car celui-ci dans le CPC a reçu un certain nombre de prérogatives qui lui permettent d’avoir une action sur les faits du procès (articles 7 alinéa 2 , 8, 10 et 179 CPC importants ++). Réciproquement, les parties (les avocats) se sont vues reconnaitre sur le droit des pouvoirs essentiels au travers de leurs écritures qui doivent exposer leurs moyens en droit à peine de nullité (article 56 deuxièmement CPC). Obligation, qui figure dans le CPC, qui a été considérablement modifiée par l’arrêt Cesareo (cf séance 4 TD) rendue en assemblée plénière le 7 juillet 2006 qui a affirmé « qu’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder cette ?. » Les parties doivent désormais n’oublier dans leurs écritures aucun des moyens de droit qui pourraient fonder leurs prétentions car seuls échapperont à la fin de non recevoir tiré de l’autorité de chose jugée (article 122 CPC) les demandes fondées sur une cause différente dont les parties n’avaient pas et ne pouvaient pas avoir connaissance au cours du 1er procès. C’est un principe de concentration qui oblige les parties à se livrer à une analyse approfondie de la demande soumise au tribunal sous le rapport de tous les moyens de droit pouvant la fonder en ratissant large car il sera ensuite impossible de revenir devant les juges pour invoquer les moyens de droit relatifs à la même demande qui auraient été oubliés lors du premier procès perdu.

((Cesareo : on dit que l’enrichissement sans cause aurait du être évoqué lors du premier procès —> principe de concentration posé en 2006 par cet arrêt, on ne peut pas évoquer postérieurement un moyen.))

Reprendre cette phrase L’arrêt Cesareo a étendu l’application du principe de concentration des moyens au défendeur le 13 février 2008 n°0622293, le 23 septembre 2010 n°0969730. Dans un arrêt de principe du 26 mai 2011 n°16135?? la deuxième chambre civile a cette fois rejeté l’existence d’un principe de concentration des demandes affirmant que « s’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci, il n’est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits. » = le principe de concentration ne joue pas lorsque l’objet des demandes successives est différent et que l’autorité de la chose jugée relative à la première demande ne pourra pas être invoquée pour faire échec à la seconde fondée sur un objet différent. Le principe de concentration est donc encadré parce que par exemple il est évident qu’une demande en paiement de loyer n’a pas le même objet dans la même affaire que la demande antérieure tendant à faire juger que la vente de l’immeuble était parfaite?? en application d’impact de préférence portant sur l’acquisition de cet immeuble. Il était important de maitriser un principe prétorien qui ne prend appui sur aucun texte, position qui a été confirmée depuis le 12 mai 2016 n°15743 et le 1er février 2018 n°1710849. C’est bien l’ensemble des moyens de nature à fonder la demande qu’il faut présenter au juge avant qu’il ne soit statué sur sa demande et non toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ou la même cause (cf arrêt 11 avril 2019 n°1731785).

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