PARAGRAPHE 2 : LE PATRIMOINE
Le patrimoine peut être vu comme le contenant dans lequel vont être
tous les droits et obligations, meubles et immeubles d’une personne.
On ne doit pas l’entendre dans le sens profane, il doit être vu dans
son sens juridique. Une personne, fortunée ou miséreuse, avec beaucoup de biens
ou pas, avec plus de dettes que de biens, possède un patrimoine. Dans tous les
cas, une personne est titulaire d’u patrimoine qui constitue un ensemble de
tous les biens, devoirs, obligations et droits qui lui sont attachés.
A.
LA COMPOSITION DU
PATRIMOINE
Le patrimoine est un ensemble composé d’un actif et d’un passif.
L’actif comprends tous les biens, toutes les choses dont une
personne est propriétaire. Tous les droits dont une personne est titulaire, dès
lors que ces droits sont appréciables en argent.
Dans l’actif on compte donc les biens + les droits patrimoniaux.
En revanche on exclut les droits extra patrimoniaux car ils ne
sont pas directement appréciables en argent (ce sont par exemple le droit de
vote, le droit d’être reconnu comme l’enfant de quelqu’un, le droit de
l’autorité parentale, les droits de la personnalité…). Comme ces droits ne sont
pas directement appréciables en argent, on ne peut pas les compter dans le
patrimoine. Ils sont intransmissibles et insaisissables.
Inversement, les droits patrimoniaux qui sont inclus dans l’actif sont
appréciables en argent, ce sont par exemple les droits réels ou personnels, et
les droits intellectuels.
Le droit réel est celui qui donne à la personne un pouvoir direct et
immédiat sur une chose. Il instaure un rapport de droit entre la personne
et sa chose. C’est un droit absolu en ce sens qu’il peut être opposé par
son titulaire à tous.
Il comporte également un droit de suite, c’est-à-dire que le
titulaire pour poursuivre sa chose : par exemple il peut agir en
revendication et réclamer sa chose a celui qui la détient.
Il comporte également un droit de préférence, cela veut dire que
si il y a un conflit entre un titulaire de droit réel et de droit personnel, on
va préférer automatiquement le titulaire du droit réel.
Donc le droit réel est un droit très fort, qui existe entre une
personne et sa chose, il emporte un pouvoir absolu.
Exemple : le droit de propriété, la servitude…
L’article 543 du code civil a une énumération de ces droits réels. Il
évoque la propriété, l’usufruit et les servitudes. D’après cet article il n’est
question que de droit de propriété, de simple droit de jouissance et de service
foncier. La formulation même est restrictive.
La question se pose alors de savoir si il y a un nombre limité de
droit réel (propriété, usufruit, servitude) ? Ou si il existe en
quantité illimitées et que les parties peuvent imaginer autant de droits réels
qu’elles le veulent ?
Ces questions ont animé la jurisprudence et la doctrine pendant des
années.
Dans l’arrêt Caquelard de 1834 deux personnes se disputent un
droit herbu et arboré : une berge.
Est-ce que les droits qui ont été consentis sur cette berge sont un
usufruit
RAPPEL : si un usufruit est a une personne physique il s’éteint a
la mort de la personne, si il est a une personne morale il dure 30 ans
Si la catégorie des droits réels est limitative c’est un usufruit, mais
si la catégorie n’est pas limitée alors les parties ont pu inventer des droits
réels
La cour de cassation juge que le code civil est déclaratif du droit
commun, mais que ce n’est pas prohibitif et que le code civil ou une autre loi
n’exclut pas diverses modifications.
« on peut décomposer comme on veut le droit de la propriété et
former un nouveau droit réel ».
Plus récemment l’arrêt maison de la poésie de 2012 : la
question se pose de savoir si la catégorie de droit réel est limitée ou non ?
La fondation « maison de la poésie » est abritée depuis des
années dans un immeuble en vente : le vendeur se réserve la
jouissance d’une partie de la maison.
Plus de 70 ans plus tard, l’acquéreur demande l’expulsion
de « la maison de la poésie » car selon lui elle occupe sans droit
les locaux.
Est-ce que le droit imaginé par les parties correspond à un
usufruit ?
Si oui, la fondation étant une personne morale, elle ne pouvait jouir
des locaux que 30 ans.
Les juges du fond estiment que ce droit d’usage est consenti au titre
d’un usufruit (donc qu’il s’est éteint au bout de 30 ans) : la demande en
expulsion est donc acceptée.
La cour de cassation casse la décision de la cour d’appel au motif
qu’il résultait de la convention un droit réel de jouissance spéciale au profit
de la fondation qui lui accordait durant toute son existence la jouissance des
locaux.
Pour la cour de cassation, la catégorie des droits réels n’est pas
limitée et les parties peuvent imaginer un droit réel de jouissance.
Il résulte du code civil que le propriétaire peut consentir (sous réserve
du droit d’ordre public) un droit réel conférant le bénéfice d’une jouissance
spéciale de son bien.
La volonté des parties peut créer le droit réel.
AUTRES EXEMPLES :
Arrêt transformateur de distributeur d’énergie de 2004.
Il s’agit d’une convention d’occupation relative à la distribution
d’énergie : ce droit d’usage spécial qui a été confectionné par les
parties correspond-il a un usufruit ou est-ce un droit d’usage spécial qui
s’éteint selon ce que les parties ont imaginé?
La cour de cassation rappelle que les parties sont libres d’imaginer
un droit conférent une jouissance spéciale.
L’arrêt sur un lot de copropriétés à usage de piscine de 2018
Les parties ont imaginé qu’un lot de copropriété a usage de piscine
faisaient objet d’un partage de jouissance et d’entretien.
Le droit concernant l’usage et la jouissance de cette piscine est-elle
un usufruit ? Si oui, le droit s’éteint au bout de 30 ans car la
copropriété est une personne morale.
La cour de cassation confirme l’existence d’un nouveau droit réel de
jouissance imaginé par les parties.
Il est donc tout à fait possible de créer autant de droit que les
parties le veulent et de décomposer les prérogatives sur la chose. Soit on
éclate chacune des prérogatives, soit on éclate la chose, soit on éclate le
temps de jouissance.
EXEMPLES :
Pour un étang : il y a des droits de jouissance imaginées sur les
étangs : l’étang appartient au propriétaire de l’étang quant à l’eau et à
la pèche mais appartient au propriétaire du sol une fois qu’il est asséché.
Pour un champ : la première récolte d’herbe peut appartenir au propriétaire
du sol mais la seconde peut appartenir à une personne qui jouirait elle aussi
du champ, pour diverses raisons.
A coté de ces droits réels, dans le patrimoine (actif), il existe des
droits personnels.
LES DROITS PERSONNELS
Les droits personnels sont ceux qui ne s’exercent pas directement
sur une chose mais qui s’exercent directement entre deux personnes. = un
créancier et un débiteur.
Le droit réel, comme il s’exerce directement sur une chose est absolu.
Mais là, le droit personnel, comme il s’exerce sur deux personnes, les
conséquences sont opposées.
Le droit personnel est un droit relatif, il établit le rapport
entre le créancier et le débiteur. Le droit personnel n’a pas de caractère
contraignant (qu’a l’égard du débiteur) : le créancier va s’adresser à
son débiteur pour obtenir la prestation attendue. Cependant il n’y a pas la
possibilité de le tenir pour aller jusqu’à l’exécution.
De même le droit personnel n’emporte pas de droit de suite :
il ne peut pas suivre la chose puisqu’il n’a pas de droit de propriété.
Tout au plus le créancier peut poursuivre pour inexécution.
Enfin le droit personnel n’emporte pas de droit de préférence,
en raison de son caractère relatif. Ce droit n’est pas opposable à tous. Il n’a
qu’un droit de gage général sur le patrimoine de son débiteur.
Les droits personnels sont en nombre illimités puisque la volonté
peut créer autant de rapports que l’on peut imaginer.
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