LE NANTISSEMENT DU FONDS DE COMMERCE DROIT COMMERCIAL

LE NANTISSEMENT DU FONDS DE COMMERCE
Généralités.- Le nantissement de fonds de commerce est une sûreté réelle mobilière sans déplacement, c'est-à-dire sans transfert de possession, qui permet notamment lorsque le fonds a une grande valeur d'obtenir les crédits nécessaires au financement de son exploitation. Le nantissement de fonds de commerce est né de l'imagination de la pratique qui devait combiner l'idée de gage et l'absence de dépossession. En effet, en droit commun le gage nécessite une dépossession du débiteur (art. 212 CDR). Appliquée au fonds de commerce, cette dépossession s'avère incompatible avec la nécessité de son exploitation. C'est une loi du 1er mars 1898, profondément modifiée par la loi du 17 mars 1909, qui a réalisé en France cette conciliation. En reprenant les dispositions de cette loi dans les articles 236 à 240 C.C. le législateur a élaboré un régime spécifique au nantissement conventionnel du fonds de commerce fonctionnant comme une véritable hypothèque mobilière (§1). En outre, pour faciliter l'acquisition par le commerçant de l'outillage et du matériel d'équipement un nantissement spécial est prévu par la loi …. du (§2).

§1. Le nantissement conventionnel

A.Conditions du nantissement
          a. Forme et publicité
1- Forme : L’article 238 CC prévoit que contrat de nantissement doit être constaté soit par acte authentique soit par acte sous seing privé. L’option pour l’une de ces formes n’est plus permise depuis la loi du 28 avril 2003 qui a ajouté l’article 189 bis  du CC dont la formule en des termes généraux (« tous les actes relatifs au fonds de commerce … » imposent le recours à peine de nullité à l’acte sous seing privé établi par les rédacteurs et sous les conditions indiqués par le texte. L’article 189 bis du code de commerce a donc implicitement abrogé la disposition de l’article 238 du même code relative à la possibilité de recourir à la forme authentique.  
L'acte de nantissement doit en outre être enregistré. (article 238 C.C.)
2- Publicité : Le nantissement doit être inscrit sur un registre public au greffe du tribunal dans le ressort duquel le fonds est exploité. (art. 238 al. 2 CC). La formalité  de l’inscription n’est pas  destinée à assurer l’opposabilité du nantissement vis à vis des tiers.L'inscription doit être prise à peine de nullité du nantissement dans le délai d’un  mois de la date de l'acte constitutif. Cette nullité peut être invoquée par tout intéressé et même par le débiteur. L’alinéa 3 de l’article 239 qui prévoit cette précision a été ajouté par la loi du 20 juin 2000 tend à inciter le créancier à réaliser cette mesure de publicité.
   Si le nantissement porte sur des succursales du fonds de commerce  une inscription doit être prise dans le même délai au greffe du tribunal dans le ressort duquel se situe chacune des succursales comprises dans le nantissement.(art. 238 al. 3)
L'inscription a effet à partir de sa date (art. 238) le privilège s'établit par le seul fait de l'inscription. Le législateur ne se prononce pas sur la durée de l'inscription, ce qui laisse supposer qu'elle dure autant que dure le nantissement ( par un raisonnement par  analogie à partir des règles de l'hypothèque).
Contrairement au privilège du vendeur, le nantissement du fonds de commerce est inopposable à la masse. Ainsi, et en application des articles 239 alinéa 2 , 462 et 463 C.C, le nantissement fait par le commerçant  pendant la période de cessation des paiements ou dans les vingt jours précédents doit être déclaré inopposable à la masse. Le nantissement peut être déclaré inopposable si le cocontractant du commerçant savait qu'il était en état de cessation des paiements. 

           b. conditions de fond
Ce sont celles relatives à l'assiette du nantissement. L'article 237 al. 1er  C.C. précise quels sont les éléments qui seuls peuvent être compris dans le nantissement, ce qui laisse entendre qu'il y a des éléments qui ne peuvent pas l'être. C'est ainsi que l'enseigne et le nom commercial, la clientèle ou  l'achalandage font partie du nantissement. Un nantissement serait en effet nul en l'absence de clientèle qui est de l'essence même du fonds de commerce. La Cour de cassation admet cependant que le nantissement d'un fond de commerce en constitution est valable.
S'il existe, le droit au bail peut faire partie du nantissement. Il en est de même pour le mobilier commercial, le matériel et l'outillage servant à l'exploitation du fonds. Enfin, sont compris dans le nantissement les droits de propriété industrielle, littéraire ou artistique. Lorsque l'acte n'en précise pas l'assiette, le nantissement est limité aux principaux éléments incorporels à savoir, l'enseigne et le nom commercial, le droit au bail, la clientèle et l'achalandage.
Le nantissement peut aussi porter sur les succursales du fonds qui doivent, dans ce cas, être désignées par l'indication précise de leurs sièges.
Sont par conséquent exclues les marchandises et les créances. Ce qui ne veut pas dire que le commerçant ne peut pas les donner en gage. Il doit cependant s'en dessaisir dans les conditions du droit commun.

§2. Effets du nantissement
A. Effets à l'égard des créanciers chirographaires. L'inscription d'un nantissement peut rendre exigibles leurs créances antérieures qui ont pour cause l'exploitation du fonds (art.241 al. 5).
B. Effets à l'égard du créancier nanti
Le nantissement confère aussi et surtout au créancier nanti une sûreté réelle. Comme le privilège du vendeur, le nantissement donne au créancier nanti un droit de préférence et un droit de suite à côté de garanties supplémentaires.
a. Le droit de préférence donne au créanciers inscrit le droit d'être payé avant tout autre[1]. Il a le droit, en application de l'article 244 C.C., lorsque le débiteur ne rembourse pas à l'échéance de faire vendre le fonds.
Dans la distribution du prix, le créancier nanti est préféré aux créanciers chirographaires et aux créanciers dont le nantissement est postérieur. Les créanciers inscrits le même jour viennent en concurrence. Mais le créancier nanti est primé par le superprivilège des salariés, le privilège général des frais de justice et les privilèges généraux du Trésor.
b.Le droit de suite est le droit pour le créancier nanti de faire vendre le fonds en quelques mains qu'il se trouve. C'est là une exception à la règle de l'article  cdr , en matière de meubles possession vaut titre. L'acquéreur peut éteindre le droit de suite par la procédure de purge (art.250). De son côté, le créancier peut faire la surenchère du dixième s'il estime que le prix est insuffisant( art.251 et s.)
c.La loi offre par ailleurs des garanties supplémentaires . En dehors du droit d'être informé de l'action résolutoire du vendeur (art.222), les garanties supplémentaires sont les mêmes que celles dont le vendeur dispose: droit d'être informé en cas de déplacement du fonds avec toutes les conséquences qui découlent de l'information ou de son défaut,  droit d'être informé de la résiliation du bail[2]  et, enfin, droit de demander la vente de la totalité du fonds lorsque seule est poursuivie la vente d'un ou de plusieurs de ses éléments (art.248).
§2. Le nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement
(à compléter).




[1] Cass.civ. n°11446 du 3 juin 1985 RJL 1985 n°3 p.78
[2] Cass.civ. n° 7689 du 20 juin 1983 B.II, 146.
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