Section
1 : La genèse et les fonctions du pouvoir politique
Paragraphe
1 : La notion de pouvoir politique selon Thomas Hobbes
Thomas Hobbes justifie la nécessité
anthropologique d’une autorité politique « supra-individuelle » en partant de
sa vision sur la nature humaine. Selon l’auteur, à l’état naturel, les individus
auraient des relations d’agressivité et de conflits perpétuels dû au fait qu’il
serait animer uniquement par des instincts et des pulsions égoïstes qui les
poussent à satisfaire uniquement leur intérêt, leur besoin individuel, ainsi
que leur bien personnel.
L’auteur pense en l’absence d’une
instance extérieure qui impose aux individus des règles à respecter dans leur
relation naturelle, de sorte que leurs actions ne portent ni préjudice, ni
atteinte au droit naturel, tout aussi légitime de l’autrui, le résultat en est
un conflit généralisé, c’est ce qui l’appelle un « état de guerre de chacun contre chacun »,
et pour dépasser cet état de belligérance/conflit qui fait de chaque humain les
mélis de l’autre. La solution serait l’institution d’un contrat par lequel les
individus acceptent de transférer certains de leurs droits et libertés,
relevant pourtant de la sphère strictement individuelle et privée, à une
autorité supra-individuelle, qui devait gérer la sphère publique et civiles (Léviathan). Le terme de communauté
civile, à chez Thomas
Hobbes, le sens d’une communauté organisée politiquement par
l’Etat, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’un contrat originaire entre les
individus qui acceptent d’être dirigés, gouvernés, par une autorité politique.
24/09/19
Pour Thomas Hobbes, le pouvoir politique naît donc
de la nécessité de concilier les conflits inerrants qui apparaissent entre les
individus et les groupes sociaux. Selon l’auteur, c’est la seule voie pour
imposer la paix sociale et la sécurité personnelle. Pour Thomas Hobbes, la communauté
civile doit être constituée sur la base du consentement des individus qui
acceptent de céder une partie des droits dont il dispose à une autorité
supra-individuelle, formant ainsi « un corps politique » ou encore « un pouvoir
commun. »
Ce pouvoir commun aurait comme
but de garantir autant les droits naturels des individus que leurs obligations
de respecter « les
lois civiles », instituées à l’aide de l’accord et de la
convention, afin que l’autorité publique puisse imposer et garantir le respect
du contrat initial par tous, en arbitrant à la fois les tensions existantes
entre des intérêts divergents, ce qui est une condition pour préserver la paix
sociale. Ce pouvoir commun selon Thomas Hobbes, est l’état incarné par un seul homme, c’est-à-dire « le souverain »
ou par un rassemblement de personnes. Pour Thomas Hobbes, les individus doivent se reconnaître
en ce pouvoir commun, et ils doivent obéir à ce pouvoir, car ce pouvoir est à
leur service, et ce pouvoir est capable de les défendre contre les attaques des
étrangers et surtout contre le mal qu’ils pourraient se faire les uns des
autres. La réalisation de ce transfert réciproque de droits, c’est-à-dire du
contrat politique originaire entre les individus, représente selon Thomas Hobbes, plus qu’un
consentement, ou encore : il s’agit, en réalité, d’une unité réelle dans
une seule personne, réalisée par une convention de toute personne avec une
autre personne. Pour Thomas
Hobbes, c’est comme si chacun disait à l’autre « j’autorise cette personne ou cette
assemblée de personnes, et je lui cède mon droit à diriger ma vie à condition
que tu lui cèdes aussi le sien et que tu lui en autorise toutes les actions de
la même façon. » Ce contrat politique a pour objectif la mise en
place d’une véritable institution du pouvoir politique fondée sur les lois
naturelles et civiles. Grâce à ce pouvoir, celui qui représente l’Etat et qui a
le pouvoir souverain est en droit de demander obéissance et soumission, en
vertu du fait que le pouvoir représente, en réalité, les individus, et que ces
derniers reconnaissent leur volonté dans les lois adoptées par la communauté
civile, à laquelle non seulement ils appartiennent, mais à laquelle ils ont
transféré leur pouvoir.
La théorie de la contractualisation
par laquelle l’Etat est vu comme le résultat d’une convention volontaire
établie. A été également développé par John Locke qui a insisté sur l’idée selon laquelle « le pouvoir
politique doit être limité par la loi afin de prévenir tous abus de la part des
autorités publiques par rapport aux libertés naturelles dont les individus
doivent jouir… » Si pour les auteurs anglais la communauté
politique et ces institutions sont nécessaires et bénéfiques, bénéfiques
notamment pour la paix sociale, la garantie notamment de la propriété et des
libertés, il faut des limites à ce pouvoir.
Paragraphe 2 : Le pouvoir politique selon Jean-Jacques Rousseau
Selon
Jean-Jacques Rousseau,
à son état naturel, l’homme était authentique, bon, orienté par l’instinct de
survie et surtout par la compassion pour ces semblables, mais que la société,
les conventions et les institutions auxquelles il est obligé de se soumettre
dans le cadre de la civilisation l’ont malheureusement transformé en un être
faible, égoïste, dominé par le mal, et surtout, orienté par son instinct
d’accaparer les propriétés privées au détriment de ces semblables. Jean-Jacques Rousseau estime
que l’Etat politique institué, suite à la conclusion du contrat social, est
resté toujours imparfait, et que l’évolution sociale n’a guère réussi
d’éliminer ces vices constitutifs. Mais en revanche, Jean-Jacques Rousseau apprécie l’apparition du
pouvoir politique, qui selon lui, s’inscrit dans la logique de l’histoire
humaine. En effet, il définit le pouvoir politique en relation avec la volonté
générale qui est, à son tour « une résultante du contrat social » qui formule
ainsi : « chacun
de nous met en commun ses propriétés, sa personne, sa vie et tout son pouvoir
sous la direction suprême de la volonté générale. » Ce contrat
social est la source de la légitimité du pouvoir car tout pouvoir s’il repose
sur le consentement et la volonté des individus unis par le pacte, est en
réalité, l’expression de la volonté générale. En considérant que les lois sont
l’expression juridique de la volonté générale, et que la volonté privée de
l’individu citoyen n’est qu’une composante, intrinsèque et indivisible de cette
volonté générale, en obéissant à ces lois, l’individu obéit, en réalité, à
lui-même et participe à la souveraineté collective, tout en gardant sa liberté
en tant que citoyen, parce que la loi exprime cette volonté. Pour Jean-Jacques Rousseau, le
contrat social est le fondement, la base de toute société civile, c’est-à-dire
d’une communauté humaine politiquement organisée.
Pour conclure, il convient de
noter que les théoriciens du contrat social plaçaient la source du pouvoir
politique dans la volonté des individus, considérés comme étant libres et égaux
de par leur nature. C’est dire que les lois adoptées expriment, en réalité, la
volonté des individus des citoyens, mais parce qu’elles sont élaborées par
leurs représentants et qui sont élus selon des procédures démocratiques et
libres. Il est vrai que les relations politiques actuelles entre les
gouvernants et les gouvernés, dans le cadre des sociétés démocratiques, évoquent
le plus souvent l’existence même d’un contrat tacite ou explicite,
et ce contrat on l’appelle « la Constitution », qui est considéré, en droit
constitutionnel, comme la norme suprême, et cette norme suprême contient des
dispositions qui doivent régir les organisations, mais également le
fonctionnement des institutions politiques.
Paragraphe 3 : Le pouvoir politique selon Max Webber
L’auteur a
analysé les structures de la société, mais aussi l’action humaine, les facteurs
qui la conditionne, les formes de légitimation du pouvoir, la structure des
institutions politiques, le rôle des idées et surtout des croyances religieuses
dont l’évolution sociale. Max
Webber définit le pouvoir comme « la chance de faire triompher à l’intérieur d’une
relation sociale sa propre volonté même en dépit d’une résistance
manifeste. » S’agissant concrètement du pouvoir politique, Max Webber dans sa définition
du politique, procède, d’une manière classique, en partant du général vers la
différence spécifique. L’auteur a commencé à définir la politique dans un sens
extensif et général, en soulignant que c’est une notion extrêmement large qui englobe
plusieurs activités. Dans ce sens, on peut faire référence à une politique de
la santé, à une politique menée par un syndicat, à la politique scolaire, d’une
ville. Dans cette conception, la politique et les relations asymétriques de
pouvoir sont communes à toutes les organisations humaines, y compris les
sociétés primitives. Pour Max
Webber, les sociétés humaines ne peuvent fonctionner sans activité de
coordination, sans l’existence d’une autorité supra-individuelle pour assurer
l’ordre et exercer le contrôle. Pour Max Webber, faire la politique signifie donc « faire de son mieux
pour participer au pouvoir ou faire de son mieux pour influencer la division du
pouvoir, soit entre l’Etat, soit dans le cadre d’un seul Etat ou encore entre
les groupes de personnes. » Pour Max Webber, avoir le pouvoir signifie donc se
trouver à la tête d’un groupe social organisé, soit pour participer
effectivement à la prise de décisions, soit pour pouvoir influer sur la façon
de diviser le pouvoir au niveau institutionnel. La politique apparaît
aujourd’hui comme étant une institution que l’on retrouve dans toutes les
formes de société humaine. Pour Max Webber, pour mettre en place une organisation politique, il
faut une institution qui légifère, qui élabore des normes, qui prend des
décisions, qui organise les services publics, qui sanctionne et enfin qui garantit
l’application et le respect des lois.
Paragraphe 4 : Le pouvoir politique selon John Locke
John Locke part de l’idée
selon laquelle, dans une société politique il faut distinguer le pouvoir et
l’Etat. John Locke
cherche à asseoir la légitimité du pouvoir politique sur le consentement
populaire, à cette fin est fait la limitation du pouvoir, mais il ne renie pas
certains principes du contrat social comme mode d’accès des individus à la
société politique. Il reprend donc la notion du contrat social qui constitue le
fond commun des théories politiques de son temps. Il a cependant une conception
originale du contractualisme politique, tant sur la manière dont il appréhende
le pouvoir dans l’état de nature que par celle dont il présente et justifie
l’accession des hommes à la société politique. John Locke se réfère au pouvoir des conditions
naturelles de l’homme, c’est-à-dire à l’état de nature. Il le relie étroitement
à l’exercice de la liberté par les individus qui sont parfaitement libres
d’ordonner leurs actions, de disposer de leurs biens et de leurs personnes
comme ils l’entendent. Mais dans les limites du droit naturel, sans demander
l’autorisation d’aucun autres hommes, ni dépendre de sa volonté. Selon John Locke, Dieu a fourni à
l’homme, dès sa naissance, les moyens de satisfaire aux nécessités de la vie.
Mais pour John Locke,
l’état de nature est loin de l’état d’anarchie décrit par certains auteurs. Selon
lui, l’homme vise sous l’empire d’une loi naturelle qui est celle de Dieu et de
la raison.
C’est un état de paix, de
bienveillance réciproque et d’assistance et même de protection naturelle. Chez John Locke, les notions de
pouvoir, de liberté et de droit de rupture se rejoignent, elles sont
étroitement dépendantes. Pour John
Locke, dès sa naissance, l’homme est muni d’un « titre » à la liberté
parfaite et est en pleine jouissance de tous les droits et privilèges de la loi
de nature. En d’autres termes, il bénéficie non seulement du pouvoir de
conserver et de défendre sa personne, mais aussi du pouvoir de juger et de
punir. Et selon lui, le pouvoir dans l’état de nature est avant tout un pouvoir
de liberté de l’individu conforme à la raison incluse dans la loi de nature.
Mais il souligne en même temps que le pouvoir individuel à des limites, car
l’homme ne peut détruire sa propre personne. L’état de nature, chez John Locke, n’est pourtant
pas dépourvu d’institutions, bien qu’elles ne soient pas encore politiques. Par
exemple, la famille est présente avec les
liens entre les hommes et les femmes, les parents et les enfants, mais il y a
également des maitres et des serviteurs. Toutefois, les hommes restent libres
et égaux, dès lors que la loi de nature est d’abord une loi d’égalité qui
exclut les privilèges, mais la question que l’on peut se poser en reconnaissant
le statut de maitres et de serviteurs, on peut se poser la question de savoir
si le mot privilège a
encore un sens ?
A propos de l’instauration de la
société politique, selon John
Locke, l’état de nature est remis en cause dès le moment où un certain
nombre d’hommes s’unissent et renoncent individuellement à leur pouvoir
d’exécuter la loi naturelle au profit de la collectivité. Dès lors, un corps
politique résultant du consentement d’hommes libres se met progressivement en
place. John Locke, dans
ses écrits, emploie le plus souvent les termes de communauté, de société
politique ou civile pour désigner ce corps. Pour lui, il y a inévitablement une
convention conclue par les hommes, au terme de laquelle les parties doivent
s’assembler et s’unir en une même communauté de manière à vivre ensemble dans
le confort, la sécurité, et la paix. John Locke cite quelques exemples où une telle convention a eu ou
a pu avoir lieu, c’est le cas de Rome et de Venise.
Il estime que Rome et Venise sont nés grâce à
l’association de plusieurs hommes libres et indépendants les uns des autres.
Mais à la différence de Jean-Jacques
Rousseau, d’autres auteurs, John Locke privilégie les expressions de « pacte » ou d’un corps, au
détriment de celle de contrat. John
Locke fait souvent référence à une convention unique qui permet
l’établissement et le fonctionnement de la société politique.
En définitive, pour John Locke, toutes les
sociétés politiques ont donc eu pour point de départ l’association volontaire
et l’accord mutuel d’hommes qui choisissaient librement leur chef et leur forme
de gouvernement. En effet, la formation du corps politique unique suppose la volonté
unanime des hommes. Il estime que l’adhésion unanime au pacte social originaire
implique l’acceptation de la règle majoritaire pour le fonctionnement de la
société instituée. Par ce biais, un certain nombre de citoyens sont investis
d’une mission de confiance qui permet d’assurer l’obéissance et l’application
de la volonté unique. Mais il condamne l’idée d’un magistrat « qui gouverne
seul » selon sa propre volonté, ses propres désirs, et non
seulement la loi. Pour l’auteur, les gouvernants doivent toujours rester
responsable devant le peuple de la mission qui leur a été confié par la
communauté, car ils sont liés par elle, et le mandat dont ils sont
bénéficiaires contribue à la limitation du pouvoir arbitraire.
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