La notion de personne en Droit Française


La notion de personne

                Alors que certaines institutions ont été créés par le droit, les personnes préexistent au droit, et c’est pourquoi le doyen Carbonnier (il a été à l’initiative de grandes réformes du XXème siècle) classait les relations familiales parmi les hypothèses relevant du non-droit. La notion juridique de personne s’est dégagée au cours des siècles, elle est liée à l’aptitude à être titulaire de droits. Les personnes sont les seuls sujets de droit, et il existe deux catégories de personnes au regard du droit, d’un côté les personnes physiques, c’est-à-dire les hommes, femmes fait de chairs et d’os, et d’un autre côté, les personnes morales, c’est-à-dire des entités abstraites non-incarnés, comme par exemple les sociétés, les associations et les syndicats. Selon la définition qui est donnée par le vocabulaire juridique de Gérard Cornu, la personne est définie comme l’être qui jouit de la personnalité juridique, c’est-à-dire de l’aptitude à être titulaire de droits et assujetti à des obligations. Curieusement, la notion de personne, qui est largement utilisée par le droit civil, n’est pas défini par le Code Civil.

Or, la définition est indispensable à comprendre, parce que c’est de cette définition que va dépendre l’application de nos règles de droits relative à cette catégorie. La personne juridique doit être distinguée de la personne humaine, au sens juridique en droit, la personne c’est le sujet de droit, celui pour qui le droit est construit et qui seul peut se prévaloir de prérogatives attribuées et sanctionnées par l’autorité publique. La personne juridique est celle qui est apte à avoir un patrimoine, à conclure des contrats, à agir en justice, etc…

L’origine étymologique du mot « personne » nous vient du latin « persona. » Ce terme est tiré du verbe « per sonare », qui signifie « parler à travers de », et ce terme « persona » faisait référence aux masques que portaient les acteurs dans l’Antiquité romaine lorsqu’ils se produisaient/jouaient sur scène, ce masque incarnait le caractère du personnage. Le terme a été repris par le droit romain pour désigner l’enveloppe juridique dont sont pourvus les sujets de droit, enveloppe que l’on appelle « la personnalité juridique », et qui fera l’objet du premier thème. Personne juridique et personne humaine sont deux choses différentes, parce que la personnalité juridique ça n’est pas une qualité que l’homme possède par nature, mais c’est une qualité que lui attribue/accorde le droit, alors que l’être humain est un fait, une réalité qui n’a pas besoin du droit pour exister. La notion de personne renvoie évidemment à la notion d’être humain, mais, toutes les personnes que reconnait le droit civil ne sont pas forcément des êtres humains, et on pense, par exemple, aux personnes morales.
Les personnes morales ce sont des groupements qui permettent de mettre en commun des biens, des connaissances, une activité ou un savoir-faire, mais ce sont des groupements, des entités particulières, en ce sens, qu’ils disposent de la personnalité juridique. Autrement dit, les personnes morales ont un patrimoine propre, distinct de celui de leurs membres, elles peuvent agir en justice, elles sont titulaires de droits et soumises à des obligations, par exemple, la personne morale qui nous unit tous, c’est l’université d’Aix-Marseille. Dans cette catégorie de personnes morales, on distingue deux catégories, les personnes morales dites de droit privé (sociétés, entreprises), d’un côté, et les personnes morales de droit public (Etat ou collectivité territoriale), d’un autre côté.

Paragraphe 1 : La définition des personnes par opposition aux choses

Le droit opère classiquement une distinction majeure/fondamentale, ce qu’on appelle aussi « une Summa divisio » entre deux catégories, qui sont les personnes et les choses. Au sens du droit, les personnes sont les sujets de droit autour desquels tout le système juridique du Code Civil est organisé. Le Livre Premier du Code Civil est consacré aux personnes physiques, qui dispose de droits sur des choses, qui elles, sont évoquées dans le Livre II, qu’elles échangent de différentes manières, évoquées dans le Livre III.

Autour de ces distinctions, il faut bien comprendre qu’on considère les personnes comme la catégorie principale, et les choses, la catégorie résiduelle. Tout ce qui n’entre pas dans la catégorie des personnes est considéré, au sens du droit, comme étant une chose.

Paragraphe 2 : La définition des personnes distinctes des êtres vivants
Seules les personnes sont considérées comme des sujets de droit, mais alors on peut s’interroger sur le statut des êtres vivants, des animaux, des embryons ou encore des cadavres. Tout ce qui ne constitue pas une personne est considéré comme une chose, mais, des évolutions contemporaines poussent à relativiser cette distinction et à réfléchir, toujours, aux frontières de la notion de personne. En effet, « certaines choses », au sens juridique, « car dépourvu de la personnalité juridique », bénéficient de règles particulières qui montre que la distinction est un peu distendue.
§  Premier exemple : Les embryons sont protégés au titre d’être humain.
§  Deuxième exemple : Le cadavre humain n’est pas traité comme une chose ordinaire, il bénéficie d’une protection particulière, qui est prévu notamment à l’article 16-1-1 du Code Civil, il dispose que « Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence. »
§  Troisième exemple : Les animaux, traditionnellement, étaient considérés comme des choses, mais depuis la loi du 16 février 2015, l’article 515-14 du Code Civil précise désormais que « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. » Mais cet article précise ensuite que les animaux restent soumis au régime des biens. En tant qu’être vivant, ils doivent être respectés, mais, ils ne sont pas pour autant des personnes, au sens juridique.

Juridiquement, les embryons, les cadavres et les animaux, entrent dans la catégorie des choses car ils n’ont pas ou perdu la personnalité juridique, mais ce sont des choses qui bénéficient d’une protection spécifique par rapport aux autres biens plus ordinaires, car ils sont ou ont été des êtres vivants.
Paragraphe 3 : Les personnes par rapport aux robots et machines intelligentes

Aujourd’hui, l’intelligence artificielle est très développée, et on constate la présence de robots et autres machines intelligentes, à la fois dans le domaine domestique que professionnel. Le développement de l’intelligence artificielle interroge les juristes dans le domaine de la justice, on parle beaucoup de la justice prédictive, c’est-à-dire une méthode de résolution des contentieux qui s’appuie sur le traitement de masses de données jurisprudentielles par des algorithmes, et c’est une forme de robotisation de la prise de décision judiciaire, les magistrats pourront être assistés par des bases de données. Plus largement, sur les robots, plus ils vont être perfectionnés et autonomes, plus ils présenteront des attributs humains, et plus la question de leur statut se posera. Déjà on commence à se poser la question, aujourd’hui, du statut juridique que l’on doit accorder aux robots. Le Parlement européen a adopté, en février 2017 une résolution contenant des recommandations pour adopter des règles de droit civil sur la robotique.

Et cette résolution propose, à terme, la création d’une personnalité juridique spécifique aux robots pour que les robots autonomes les plus sophistiqués, puissent être considérés comme des personnes électroniques responsables, tenus de réparer tous dommages causés à un tiers. Beaucoup d’auteurs l’ont critiqué, mais, toute la communauté scientifique a conscience de la nécessité de réfléchir et d’anticiper les nouvelles problématiques qui vont être soulevées par le développement de l’intelligence artificielle.


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