Section 1 : Les caractères de l’état des personnes
Paragraphe 1 : Le caractère indivisible de l’état des personnes
L’état
est dit indivisible, c’est-à-dire qu’une personne ne peut pas avoir simultanément
deux états contraires, et ne saurait réclamer certains attributs de son état et
en répudier d’autres. L’état est insaisissable, c’est-à-dire que les
prérogatives attachées à l’état ne peuvent être exercer par des tiers, ce qui
signifie que les actions d’état sont des actions purement personnelles.
Paragraphe 2 : L’imprescriptibilité de l’état
L’imprescriptibilité
de l’état signifie que ni la prescription acquisitive (au bout d’un
certain temps j’acquiers un droit), ni la prescription extinctive
(j’ai un certain délai pour agir) ne touche l’état des personnes.
A- La prescription extinctive
Cela signifie
qu’on ne peut pas perdre son état par l’écoulement du temps peu importe qu’on
demeure parfois pendant très longtemps sans réclamer/invoquer son état. Par exemple, un époux ne devient pas célibataire du
seul fait qu’elle ne respecte pas ses devoirs conjugaux pendant 30 ans ou
plus. On ne perd pas sa qualité d’enfant du seul fait que l’on a plus de relations
avec ses parents. Lorsqu’il s’agit de réclamer un état, par exemple, dans le domaine de la filiation, il
existe des règles de prescription extinctive, puisqu’en principe passé un délai
de 10 ans, à compter de sa majorité, une personne ne peut plus exercer
d’actions en établissement ou en contestation de la filiation, c’est l’article 321 du Code
Civil.
B- La prescription acquisitive
Le principe
d’imprescriptibilité signifie, qu’en principe, on ne peut pas acquérir un état
par l’écoulement du temps, par exemple, on
n’obtient pas le statut d’époux du seul fait de vivre avec un homme ou une
femme. Mais il y a des exceptions, puisque la jurisprudence a déjà admis qu’une
personne ait pu acquérir un nom par le fait d’une possession extrêmement
prolongée.
Paragraphe 3 : L’indisponibilité de l’état
Cela signifie
que l’état des personnes est placé hors d’atteinte des volontés individuelles,
c’est-à-dire que les éléments qui constituent l’état d’une personne, ne peuvent
être remis en cause par la seule volonté individuelle. Quand on parle de
l’indisponibilité d’un bien ou d’un objet, cela renvoie au fait qu’on ne peut
librement disposer de cet objet, c’est-à-dire qu’on ne peut pas l’aliéner, ni
le détruire, ni en décider librement.
L’indisponibilité de l’état
signifie qu’il est interdit de porter atteinte aux éléments qui permettent
d’identifier et d’individualiser les personnes. Cela signifie aussi qu’on ne
peut pas, par convention, renoncer à un élément de son état, par exemple, je ne peux pas conclure un contrat dans
lequel je m’engage à ne jamais faire d’action en recherche de paternité. Ce
principe peut parfois être nuancer, puisque par exemple,
l’usage du nom de famille peut être céder, pour devenir la dénomination sociale
d’une société. Le droit français permet une procédure de changement de sexe,
qui est basé sur la volonté de la personne. Le principe d’indisponibilité de
l’état justifie l’interdiction, en droit français, de la gestation pour autrui
(GPA). La gestation pour autrui est un procédé médical qui consiste à faire
porter un enfant par une femme, qu’on appelle la « mère porteuse », qui ensuite,
l’abandonne à la naissance, au profit d’un couple ou d’une autre personne, que
l’on appelle le « parent
d’intention. » L’interdiction de la GPA a d’abord été affirmé par
la Cour de cassation, dans un arrêt d’assemblée plénière du 31 mai 1991, sur le fondement de l’ordre public,
et de l’indisponibilité du corps humain et l’état des personnes. Suite à cette
décision, la loi bioéthique du 29 juillet 1994 a inséré un article 16-7 au sein du Code Civil, qui dispose
que « Toute
convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui
est nulle. »
Les difficultés, aujourd’hui,
viennent du fait qu’elle est autorisée dans beaucoup de pays étrangers qui,
parfois, sont même très proches géographiquement. Il arrive que des français se
déplacent à l’étranger pour conclure une convention de GPA, et qui reviennent
en France avec l’enfant, mais aussi avec un jugement ou un acte de naissance
étranger qui les désigne comme étant les parents de l’enfant. Jusqu’en 2014, la Cour de cassation refusait, par rapport
au principe de l’indisponibilité de l’état des personnes, de transcrire sur les
registres français les actes étrangers lorsque les circonstances pouvaient
laisser penser que l’enfant était issu d’une convention de GPA (Cour de
cassation, 6 avril 2011, n°10-19053). Finalement, la France a été
condamné par la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt du 26 juin 2014, c’est l’affaire Mennesson. Dans cette décision, la Cour
européenne a considéré que la position du droit français portée atteinte au
droit à l’identité des enfants, qui est une composante de la vie privée, qui
est protégé par l’article
8 de la CEDH. La Cour européenne, dans cet arrêt, a concentré son
analyse sur la filiation paternelle, considérant qu’il était contraire à
l’intérêt de l’enfant de le priver d’un lien juridique, dont la réalité
biologique est avérée. La position de la Cour de cassation a évolué et la Cour
autorise aujourd’hui la transcription de l’acte étranger lorsqu’il correspond à
la réalité, c’est-à-dire quand il mentionne comme père, le père biologique de
l’enfant, qui est le plus souvent, le père d’intention, et comme mère, la femme
ayant accouchée (Cour de cassation, assemblée plénière, 3 juillet 2015, n°15-50002 et n°14-21323).
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