Les conditions de formation du mariage en droit Française



Section 1 : Les conditions de formation du mariage

Il y a 2 sortes de conditions :
-          Les conditions de fond (§1)
-          Les conditions de forme (§2)

§1 Les conditions de fond

I.                    Les conditions physiologiques

Au départ, il y avait 3 conditions qui rentraient dans cette catégorie :
-          Le sexe
-          L’âge
-          La santé

A)     La différence de sexe des époux

Traditionnellement, depuis que le mariage existe, le mariage a toujours été possible pour les personnes de sexes différents. On a eu certains maires, dans les années 2000, qui ont célébré des mariages de personnes homosexuelles. Cela a évidemment généré un contentieux. La question du mariage homosexuel s’est posée pour la première fois devant la Cour de Cassation. La Cour de Cassation dans un arrêt du 13 mars 2007, et elle affirme dans un arrêt de principe que selon la loi française, le mariage est l’union d’un homme et d’une femme. Elle annule aussi les mariages homosexuels qui avaient été célébrés. Est-ce qu’il n’était pas contraire à la Constitution et à la CEDH ? Grosso modo, le législateur, est-ce que désormais on ne porte plus atteinte aux droits fondamentaux ? Le Conseil Constitutionnel s’est prononcé, et la Cour Européenne. Le Conseil Constitutionnel s’est prononcé le 28 janvier 2011. La CrEDH s’est prononcé le 28 juin 2010. Il ne conclut, ni l’un ni l’autre, à une atteinte aux droits fondamentaux. Il n’y a pas de condamnation, ça fait partie de la marge d’appréciation des Etats. Pour la CrEDH, pas d’atteinte à la liberté du mariage. Le Conseil Constitutionnel que cela ne porte pas atteinte pas à une liberté de se marier ni ne contrevient à la Constitution. Il n’y avait aucune pression aux droits fondamentaux pour changer notre législation. On était libre de rester avec une condition stricte où les mariages étaient réservés aux couples hétérosexuels. C’est la loi du 17 mai 2013 qui consacre le mariage pour tous, et qui inscrit pour la première fois une disposition fondamentale, qui est l’article 143 du Code Civil « le mariage est contracté par 2 personnes de sexes différents ou de même sexe ». Il n’y a plus d’exigence d’avoir des époux de sexes différents. Ca facilite la question des transsexuels, ils peuvent se marier avec qui ils veulent. Il est prévu à l’article 202 – 1 du Code Civil que de 2 personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l’une d’elles soit sa loi personnelle, soit la loi de l’Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence, le permet.

B)     L’âge

Pour pouvoir se marier, depuis 2006, il faut avoir 18 ans révolu. C’est l’article 144 qui nous dit que « le mariage ne peut être contracté avant 18 ans révolu ». Avant, ce n’était pas le cas. La logique de la loi de 2006, c’est de lutter contre le mariage forcé, et notamment le mariage forcé des très jeunes femmes. Avant 2006, pour les femmes, elles pouvaient se marier à 15 ans. Il n’y a pas de seuil d’âge pour se marier. Il n’y a pas d’écart d’âge non plus attendu.
Il existe toutefois une dispense possible qui peut être accordée pour motif grave. C’est l’article 145 du Code Civil qui le prévoit, et l’autorité qui est compétente, c’est le Préfet. Il peut accorder cette dispense pour motif grave. A défaut de dispense, le mariage est interdit pour les mineurs.

II.                  Le consentement

Le consentement, c’est LA condition fondamentale pour valider un mariage. C’est logique, c’est lié à la liberté de se marier. Il faut que chacun des époux ait son consentement son mariage pour valider son mariage.
Les exigences sur le consentement sont de 2 sortes :
-          Il nous faut un consentement qui existe
-          Il nous faut un consentement qui est intègre

A)     L’existence du consentement

On a un seul article, l’article 146, qui nous dit « il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement ». Tout ce qui relève de l’article 146 est une nullité absolue.
Il y a 3 situations différentes :
-          Il faut que le consentement soit exprimé.
-          Il n’y aura pas de consentement s’il y a un défaut de l’esprit = il ne faut pas qu’il y ait une insanité d’esprit.
-          Il va y avoir absence de consentement lorsqu’il y a absence d’intention matrimoniale.

1)      L’expression du consentement

L’expression du consentement est nécessaire comme condition de fond du mariage. Il faut que le consentement soit donc exprimé publiquement pour former le mariage. C’est l’article 75 qui nous dit que les parties doivent se déclarer pour se prendre pour époux. Le principe, c’est que l’expression du consentement est libre. La modalité d’exprimer un consentement est libre. La difficulté, c’est quand on est face à une difficulté d’expression. Par exemple, quand on est sur son lit de mort, et qu’on fait un mariage in extremis.
Il faut savoir qu’il y a une situation particulière que le droit français autorise. Le droit français adore les fictions. Il créé le mariage posthume. Cela est possible, et cela est prévu à l’article 171 du Code Civil. L’article 171 nous dit « Le Président de la République peut, pour des motifs graves, autoriser la célébration du mariage en cas de décès de l'un des futurs époux, dès lors qu'une réunion suffisante de faits établit sans équivoque son consentement ». Il faut démontrer que la volonté de l’époux était sans équivoque. C’est une sorte d’exception. Le mariage posthume n’entraine pas tous les droits d’un mariage. On va faire en sorte de jouer les effets du mariage avant le décès, mais on ne bénéficie pas de tous les droits. Le droit pourra user du nom d’usage du défunt, on pourra faire jouer la présomption de paternité, on va pouvoir bénéficier de droits fiscaux. Mais on ne pourra pas avoir de droits successoraux. C’est une sorte d’équilibre à trouver.

2)      L’insanité d’esprit

Pour pouvoir se marier et pour que le mariage soit valable, il faut que le mariage soit prononcé en toute connaissance de cause, que l’individu ait bien conscience de l’engagement et de la portée de ce dernier. S’il y a donc une altération de ses facultés mentales, qui va altérer son discernement, on va considérer qu’il y a un défaut de consentement au sens de l’article 146. Il faut démontrer que l’individu n’a pas compris le sens et la portée du consentement qu’il a pourtant exprimé.

3)      Absence d’intention matrimoniale

L’idée, c’est qu’un individu va exprimer son consentement en pleine possession de ses capacités mentales, mais il le fait en cherchant des effets secondaires ou accessoires au mariage. En fait, les époux consentent au mariage sans vouloir assumer les effets principaux du mariage. Leur consentement est donc dicté par des intérêts accessoires liés au statut d’époux. Si on consent au mariage pour prendre une toute partie du mariage sans en prendre l’essence, le droit estime qu’on ne veut pas se marier.
On va considérer que le consentement n’existe pas.
Il n’y a pas de liste. La logique s’appuie dans la jurisprudence. Arrêt Appietto de novembre 1963 « lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie du mariage qu’en vue d’atteindre un but étranger à l’union matrimoniale ». Si c’est pour obtenir la nationalité, les avantages successoraux, etc… on va considérer qu’il y a recherche d’avantages accessoires. Arrêt de décembre 2012 où on va reconnaître l’absence d’intention matrimoniale.

B)     Un consentement intègre

1)      Un consentement libre
L’intégrité du consentement relève d’une nullité relative. L’article phare qui relève de cette catégorie, c’est l’article 180 du Code Civil « Le mariage qui a été contracté sans le consentement libre des deux époux, ou de l'un d'eux, ne peut être attaqué que par les époux, ou par celui des deux dont le consentement n'a pas été libre, ou par le ministère public. L'exercice d'une contrainte sur les époux ou l'un d'eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage.
S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage »
Il y a 2 sortes de vice dans lequel le consentement peut être atteint. Il faut que le consentement doit être donné librement, et il faut que le consentement soit éclairé. Le mariage c’est à la fois une institution et un contrat. Dans le mariage, finalement, on retrouve l’erreur et la violence, mais pas le dol. Sur le mariage, un auteur a dit « trompe qui peut ». Dans un contrat classique, il y a 2 formes de vice :
-          L’erreur ;
-          La violence.
Il faut que le consentement soit librement exprimé par les époux. Le consentement va être considéré comme vicié lorsqu’il aura été donné sous la menace, sous la contrainte, que cette contrainte soit physique, morale, voire même patrimoniale, que la contrainte soit faite par l’autre époux, ou alors elle peut être exprimé par un tiers, ou peut même venir d’une crainte révérencielle. On considère que le consentement n’est pas libre, n’est pas consenti, il est vicié.

2)      Un consentement éclairé

Il faut que le consentement soit intègre, soit éclairé. C’est l’alinéa 2 de l’article 180 « S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage ». Une erreur dans la personne, c’est en fait une erreur sur son état civil (son nom, son sexe…). Il y avait des éléments très réduits pour remettre en question le mariage.
Une erreur sur les qualités essentielles de la personne, c’est qu’en réalité, il faut être victime d’une erreur que l’on doit qualifier comme étant essentielle. 
Pour demander la nullité, il faut que la qualité soit essentielle subjectivement pour l’époux. Pour considérer si la qualité est essentielle subjectivement, il faut qu’elle entache la vie commune après le mariage.

III.                La capacité des époux

L’idée est de s’interroger sur les situations de personnes qui connaissent une incapacité. Il y a 2 catégories :
-          Les mineurs
-          Les majeurs protégés
Qu’ont-ils besoin pour exercer le droit de se marier ?

A)     Les mineurs

Il faut l’autorisation du ministère public pour se marier. Si le mineur a obtenu l’autorisation du ministère public, ça ne suffit pas. Si le mineur obtient une dérogation du ministère public, il va lui falloir des autorisations supplémentaires. Il faut en plus qu’il ait un ou des consentements familiaux. C’est le code qui prévoit qui doit consentir au mariage d’un mineur. On a plusieurs articles. Ce sont les articles 148, 149, 150 et 159. On nous dit qu’il faut les consentements des père et mère s’ils sont vivants, et en état de manifester leur volonté. Si l’un refuse le consentement, l’accord de l’autre suffit. Evidemment, en cas de décès d’un des parents, l’autre accord suffit. En cas de décès des deux parents, c’est l’accord d’un ascendant. A défaut d’ascendant, c’est l’accord du conseil de famille. Le consentement peut être donné au moment du mariage, ou il peut l’être avant le mariage par acte authentique.

ð  01/02/2019

B)     Les majeurs

Quel consentement doit être requis pour avoir le droit de se marier ?
Pour le majeur, il existe des règles spéciales pour le majeur en curatelle et le majeur en tutelle. Pour la tutelle, c’est l’article 460 alinéa 1er du Code Civil. Pour la curatelle, c’est l’alinéa 2 de l’article 460. Pour un majeur en curatelle, il lui faut l’autorisation de son curateur, et à défaut, le majeur protégé peut saisir le juge des tutelles pour obtenir le droit de se marier. Pour le majeur placé en tutelle, ce qu’il faut, c’est une autorisation préalable du juge.
Plusieurs remarques sur cet article. Il y a quelques réflexions à avoir.
-          Pour la tutelle, il n’est plus nécessaire pour le juge de recueillir l’avis du médecin-expert.
-          Le mariage est la liberté à un droit. La question qui se pose, c’est de savoir si ces autorisations préalables ne constituent pas une atteinte disproportionnée au droit fondamental de se marier. Cette question a été posée aussi bien sur une problématique de curatelle que le majeur protégé par la tutelle. Quand le Conseil a été saisi en 2012 par une QPC, il a été saisi pour la curatelle. Le Conseil Constitutionnel valide l’article 460. Pour le Conseil Constitutionnel, on a une législation qui trouve un bon équilibre. Le système est considéré comme constitutionnel. Par un arrêt du 25 octobre 2018, c’est monté jusqu’à la CrEDH. Il lui a été demandé de se positionner sur l’article 460, pour savoir s’il n’était pas contraire à la Constitution au droit de se marier. La CrEDH valide le système français. Elle estime que le juge est là en complément du majeur.

IV.               Les interdits sociaux

L’Etat français va placer des interdits à un mariage. Il n’y en avait pas que 2. Il y avait d’autres empêchements sociaux. Il y avait la complicité d’adultère. Il y avait la situation des époux divorcés. Il y avait la fameuse mort civile.

1)      La polygamie

L’article 147 du Code Civil précise qu’on ne peut pas contracter un second mariage si le premier n’a été dissout. Il faut avoir un ordre juridique pour se marier, donc il faut avoir divorcé, ou il faut annuler son mariage. Dans un arrêt du 11 avril 2018, la Cour de Cassation rappelle aux juges du fond un ordre, avant de prononcer la nullité du deuxième mariage, de vérifier la nullité du premier.

2)      L’inceste

L’inceste, c’est une structure qui existe depuis des siècles. Pour preuve, l’inceste existe aussi dans l’adoption, alors qu’il n’y a pas de sang.
Juridiquement, il y a 3 articles qui délimitent l’inceste : les articles 161, 162 et 163. « En ligne directe, le mariage est prohibé entre tous les ascendants et descendants et les alliés dans la même ligne » (article 161). « En ligne collatérale, le mariage est prohibé, entre le frère et la sœur, entre frères et entre sœurs » (article 162). « Le mariage est prohibé entre l'oncle et la nièce ou le neveu, et entre la tante et le neveu ou la nièce » (article 163). Sont interdits les collatéraux au 3ème degré visés à l’article 163.
En-dehors de ces cas, c’est possible. Donc avec mon cousin germain, c’est possible.
Il y a aussi en matière d’adoption. Il y a 2 types d’adoption : adoption plénière (article 356 du Code Civil qui y fait référence « L'adoption confère à l'enfant une filiation qui se substitue à sa filiation d'origine : l'adopté cesse d'appartenir à sa famille par le sang, sous réserve des prohibitions au mariage visées aux articles 161 à 164.
Toutefois l'adoption de l'enfant du conjoint laisse subsister sa filiation d'origine à l'égard de ce conjoint et de sa famille. Elle produit, pour le surplus, les effets d'une adoption par deux époux ») ; l’adoption simple, c’est cumuler 2 familles. C’est l’article 366 du Code Civil qui nous précise avec qui l’adoptant ne peut pas se marier avec sa famille adoptive « Le lien de parenté résultant de l'adoption s'étend aux enfants de l'adopté.
Le mariage est prohibé :
1° Entre l'adoptant, l'adopté et ses descendants ;
2° Entre l'adopté et le conjoint de l'adoptant ; réciproquement entre l'adoptant et le conjoint de l'adopté ;
3° Entre les enfants adoptifs du même individu ;
4° Entre l'adopté et les enfants de l'adoptant.
Néanmoins, les prohibitions au mariage portées aux 3° et 4° ci-dessus peuvent être levées par dispense du Président de la République, s'il y a des causes graves.
La prohibition au mariage portée au 2° ci-dessus peut être levée dans les mêmes conditions lorsque la personne qui a créé l'alliance est décédée ».

Le Code prévoit des dispenses, évoquées à l’articles 164 du Code Civil « Néanmoins, il est loisible au Président de la République de lever, pour des causes graves, les prohibitions portées :
1° Par l'article 161 aux mariages entre alliés en ligne directe lorsque la personne qui a créé l'alliance est décédée ;
2° (Abrogé) ;
3° Par l'article 163 »
La dérogation est possible en cas de décès, ou si le mariage projeté est avec son oncle ou sa tante.

La CrEDH a condamné la Grande-Bretagne, au nom du droit de se marier, parce que les limitations qui avait en matière d’interdits à un mariage dans l’alliance portaient une atteinte substantielle au droit de se marier. Quid de notre système français ?

§2 Les conditions de formes

Sur le mariage, il y a des conditions qui sont préalables à la célébration (A), et des formalités sur la célébration elle-même (B).

A)     Les conditions préalables à la célébration

Les époux doivent remettre à l’officier d’état civil un certain nombre de pièces, dont l’extrait d’acte de naissance, avec indication de la filiation, qui ne doit pas dater de plus de 3 mois. Il y a ensuite, et c’est à l’appréciation de l’officier d’état civil, ce dernier peut, s’il le souhaite, procéder avant la célébration du mariage à l’audition des futures époux. Au vu des pièces qu’on va fournir, si l’officier a un doute sur l’insanité d’esprit etc…, il va pouvoir interroger les époux. Autre formalité, il s’agit de la publication des bans, par voie d’affichage, la future célébration du mariage. La publication doit aussi bien avoir lieu à la mairie des époux qu’à la mairie de célébration du mariage, et cette publication doit avoir lieu au minimum 10 jours avant que la célébration ait lieu.
Ce sont les seules formalités qui ne pourront pas donner lieu à une nullité du mariage.

B)     Les formalités liées à la célébration du mariage

Le mariage, c’est un mariage qui est laïc. Il faut que la célébration ait lieu à l’état civil, devant l’officier d’état civil. Elle doit avoir lieu avant le mariage religieux, s’il y en a. En revanche, les ministres du culte encourent des sanctions pénales s’ils célèbrent un mariage religieux avant le mariage civil. Ce qui compte, ce sont les mariages laïc. Ensuite, il faut que ça soit l’officier d’état civil qui célèbre le mariage, il faut que ce soit en mairie. Il faut que la célébration soit publique, c’est-à-dire portes publiques.
Il peut y avoir des dérogations, qui sont prévues à l’article 75 du Code Civil. Il faut faire sa demande auprès du Procureur de la République. Il faut, le jour de la cérémonie, la présence des époux, qui doivent comparaitre eux-mêmes devant l’officier d’état civil, et il n’existe pas de procuration. Il faut a minima 2 témoins, maximum 4 témoins. Et peu importe la qualité des témoins. L’officier d’état civil doit lire un certain nombre d’articles du Code Civil, c’est une obligation. A la fin, on leur demande de se prononcer, on demande aux époux de bien extérioriser le consentement. Il faut signer l’acte de mariage. Il est signé par les époux et par les témoins.

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