TD DROIT DES BIENS SEANCE N°5: DROIT DE PROPRIETE et EMPIETEMENT LICENCE 3


SEANCE N°5: DROIT DE PROPRIETE et EMPIETEMENT


Sanction de l’empiètement
Commentaire groupé :
Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2016, n°15-21949, n°15-25113, n° 15-19561
Cass. civ. 3ème, 21 décembre 2017, n° 16-25406
Cass. civ. 3ème, 17 mai 2018, n° 16-15792

Cour de cassation, chambre civile 3
Audience publique du jeudi 10 novembre 2016, n° de pourvoi: 15-25113
Publié au bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles 544 et 545 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bourges, 2 juillet 2015), que M. et Mme X..., propriétaires de la parcelle AN 305, et M. et Mme Y..., propriétaires de la parcelle AN 151, ont assigné leur voisin, M. Z..., propriétaire de la parcelle 462, en enlèvement d'un bâtiment constituant un atelier-garage empiétant sur leurs fonds ;

Attendu que, pour ordonner la démolition totale du bâtiment, l'arrêt retient qu'il empiète sur le fonds de M. et Mme X..., que les considérations de l'expert selon lequel l'empiétement représenterait une bande d'une superficie de 0, 04 m ² sont inopérantes au regard des dispositions des articles 544 et 545 du code civil et que cet empiétement fonde la demande de démolition de la construction litigieuse ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si un rabotage du mur n'était pas de nature à mettre fin à l'empiétement constaté, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en qu'il condamne M. Z... à démolir le bâtiment édifié sur sa parcelle 462, ... à Decize (58) et dit que cette démolition devra être achevée dans un délai de six mois de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai, l'arrêt rendu le 2 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Cour de cassation, chambre civile 3
Audience publique du jeudi 10 novembre 2016, n° de pourvoi: 15-19561
Publié au bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 545 du code civil ;
Attendu que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 18 mars 2015), que les consorts X..., propriétaires d'une maison édifiée sur une parcelle cadastrée C 508, ont assigné les consorts Y..., propriétaires d'une parcelle voisine cadastrée C 507, en démolition d'éléments de toiture et d'ouvrages résultant de travaux de surélévation effectués en 1982 et empiétant sur leur fonds ;
Attendu que, pour rejeter la demande en démolition des consorts X..., l'arrêt retient que le toit du bâtiment des consorts Y... empiète de vingt centimètres sur la propriété X... mais que ce débord n'est à l'origine d'aucun désordre ni sinistre et que sa rectification, alors qu'il englobe le conduit de la cheminée des consorts X..., pourrait modifier un équilibre et engendrer des infiltrations dans le mur mitoyen, ce qui serait préjudiciable aux deux parties, et que la démolition des éléments de la toiture est disproportionnée, en l'absence de préjudice, et inadaptée, compte tenu de la configuration des lieux ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que les consorts X... étaient en droit d'obtenir la démolition de la partie du toit empiétant sur leur propriété, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Cour de cassation chambre civile 3
Audience publique du jeudi 10 novembre 2016, n° de pourvoi: 15-21949
Publié au bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 5 mai 2015), que les consorts X...- Y... sont propriétaires d'un fonds, voisin de celui de M. Z... ; qu'un arrêt du 22 janvier 2008 a constaté l'empiétement des constructions des consorts X...- Y... sur le fonds Z... et leur a accordé un délai de deux ans sous astreinte pour le supprimer ;
Attendu que les consorts X...- Y... font grief à l'arrêt de liquider l'astreinte, alors, selon le moyen :
1°/ que si le propriétaire du fonds sur lequel repose une partie de l'immeuble de son voisin peut en exiger la démolition, celle-ci ne peut être poursuivie lorsqu'elle est abusive ; que, dès lors, la liquidation de l'astreinte qui assortit l'injonction de démolir la partie d'un immeuble empiétant sur un fonds voisin ne peut être poursuivie lorsque, malgré la réalisation de travaux de démolition, un empiétement minime subsiste sur le fonds de son voisin et que la réalisation de travaux supplémentaires peut entraîner des conséquences disproportionnées sur le patrimoine du propriétaire de l'immeuble en cause, compte tenu de sa bonne foi, de celle de son voisin, du coût des travaux réalisés et de ceux qui restent encore à faire, de la valeur des biens en cause et de la gravité de l'empiétement subsistant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les consorts X... et Y... ont, en exécution d'une décision du 22 janvier 2008, effectué personnellement des travaux de démolition partielle de leur maison afin de supprimer l'empiètement qu'elle causait sur le fonds de M. Z... ; qu'en retenant, pour les condamner néanmoins au versement de l'astreinte qui assortissait cette injonction, que, malgré leur bonne foi et l'importance des travaux réalisés, subsistait un empiétement de plusieurs centimètres sur le fonds de M. Z..., et qu'étaient inopérants leurs moyens relatifs à la faiblesse du trouble supporté par ce dernier, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, eu égard à l'importance des travaux réalisés et de ceux qui restaient à effectuer, à la mauvaise foi de M. Z..., à la bonne foi des consorts X... et Y..., à l'impossibilité pour eux de se retourner contre l'ancien propriétaire de ce bien qu'ils avaient acquis aux enchères, à la valeur des biens en cause et à la faible importance de l'empiétement subsistant, M. Z... n'avait pas fait un usage abusif de son droit de propriété en demandant la liquidation de cette astreinte au motif qu'un empiétement minime demeurait sur son fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 545 du code civil et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ qu'aucun droit ne peut être interprété comme impliquant, pour un Etat, un groupement ou un individu, le droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés d'un autre individu ; que l'exercice d'un droit peut toujours dégénérer en abus ; que si le propriétaire du fonds sur lequel repose une partie de l'immeuble de son voisin peut en exiger la démolition, celle-ci ne peut être poursuivie lorsqu'elle est abusive ; que, dès lors, la liquidation de l'astreinte qui assortit l'injonction de démolir la partie d'un immeuble empiétant sur un fonds voisin ne peut être poursuivie lorsque, malgré la réalisation de travaux de démolition, un empiétement minime subsiste sur le fonds de son voisin et que la réalisation de travaux supplémentaires peut entraîner des conséquences disproportionnées sur le patrimoine du propriétaire de l'immeuble en cause, compte tenu de sa bonne foi, de celle de son voisin, du coût des travaux réalisés et de ceux qui restent encore à faire, de la valeur des biens en cause et de la gravité de l'empiétement subsistant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les consorts X... et Y... ont, en exécution d'une décision du 22 janvier 2008, effectué personnellement des travaux de démolition partielle de leur maison afin de supprimer l'empiétement qu'elle causait sur le fonds de M. Z... ; qu'en retenant, pour les condamner néanmoins au versement de l'astreinte qui assortissait cette injonction, que, malgré leur bonne foi et l'importance des travaux réalisés, subsistait un empiétement de plusieurs centimètres sur le fonds de M. Z..., et qu'étaient inopérants leurs moyens relatifs à la faiblesse du trouble supporté par ce dernier, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, eu égard à l'importance des travaux réalisés et de ceux qui restaient à effectuer, à la mauvaise foi de M. Z..., à la bonne foi des consorts X... et Y..., à l'impossibilité pour eux de se retourner contre l'ancien propriétaire de ce bien qu'ils avaient acquis aux enchères, à la valeur des biens en cause et à la faible importance de l'empiétement subsistant, M. Z... n'avait pas porté une atteinte disproportionnée au patrimoine des consorts X... et Y... en demandant la liquidation de cette astreinte au motif qu'un empiétement minime demeurait sur son fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 de la Convention européenne des droits de l'homme, 54 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, 1er du Protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme, 545 du code civil et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ qu'aucun droit ne peut être interprété comme impliquant, pour un Etat, un groupement ou un individu, le droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés d'un autre individu ; que l'exercice d'un droit peut toujours dégénérer en abus ; que si le propriétaire du fonds sur lequel repose une partie de l'immeuble de son voisin peut en exiger la démolition, celle-ci ne peut être poursuivie lorsqu'elle est abusive ; que, dès lors, la liquidation de l'astreinte qui assortit l'injonction de démolir la partie d'un immeuble empiétant sur un fonds voisin ne peut être poursuivie lorsque, malgré la réalisation de travaux de démolition, un empiétement minime subsiste sur le fonds de son voisin et que la réalisation de travaux supplémentaires peut entraîner des conséquences disproportionnées sur la vie privée et familiale du propriétaire de l'immeuble en cause, compte tenu de sa bonne foi, de celle de son voisin, du coût des travaux réalisés et de ceux qui restent encore à faire, de la valeur des biens en cause et de la gravité de l'empiétement subsistant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les consorts X... et Y... ont, en exécution d'une décision du 22 janvier 2008, effectué personnellement durant plusieurs mois des travaux de démolition partielle de leur maison afin de supprimer l'empiétement qu'elle causait sur le fonds de M. Z... ; qu'en retenant, pour les condamner néanmoins au versement de l'astreinte qui assortissait cette injonction, que, malgré leur bonne foi et l'importance des travaux réalisés, subsistait un empiétement de plusieurs centimètres sur le fonds de M. Z..., et qu'étaient inopérants leurs moyens relatifs à la faiblesse du trouble supporté par ce dernier, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, eu égard à l'importance des travaux réalisés et de ceux qui restaient à effectuer, à la mauvaise foi de M. Z..., à la bonne foi des consorts X... et Y..., à l'impossibilité pour eux de se retourner contre l'ancien propriétaire de ce bien qu'ils avaient acquis aux enchères, à la valeur des biens en cause et à la faible importance de l'empiétement subsistant, M. Z... n'avait pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale des consorts X... et Y... en demandant la liquidation de cette astreinte au motif qu'un empiétement minime demeurait sur son fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 54 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que des articles 545 du code civil et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
4°/ qu'aucun droit ne peut être interprété comme impliquant, pour un Etat, un groupement ou un individu, le droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés d'un autre individu ; que l'exercice d'un droit peut toujours dégénérer en abus ; que si le propriétaire du fonds sur lequel repose une partie de l'immeuble de son voisin peut en exiger la démolition, celle-ci ne peut être poursuivie lorsqu'elle est abusive ; que, dès lors, la liquidation de l'astreinte qui assortit l'injonction de démolir la partie d'un immeuble empiétant sur un fonds voisin ne peut être poursuivie lorsque, malgré la réalisation de travaux de démolition, un empiétement minime subsiste sur le fonds de son voisin et que la réalisation de travaux supplémentaires peut entraîner des conséquences disproportionnées sur du propriétaire de l'immeuble en cause à jouir de son domicile, compte tenu de sa bonne foi, de celle de son voisin, du coût des travaux réalisés et de ceux qui restent encore à faire, de la valeur des biens en cause et de la gravité de l'empiétement subsistant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les consorts X... et Y... ont, en exécution d'une décision du 22 janvier 2008, effectué personnellement durant plusieurs mois des travaux de démolition partielle de leur maison afin de supprimer l'empiétement qu'elle causait sur le fonds de M. Z… ; qu'en retenant, pour les condamner néanmoins au versement de l'astreinte qui assortissait cette injonction, que, malgré leur bonne foi et l'importance des travaux réalisés, subsistait un empiétement de plusieurs centimètres sur le fonds de M. Z..., et qu'étaient inopérants leurs moyens relatifs à la faiblesse du trouble supporté par ce dernier, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, eu égard à l'importance des travaux réalisés et de ceux qui restaient à effectuer, à la mauvaise foi de M. Z..., à la bonne foi des consorts X... et Y..., à l'impossibilité pour eux de se retourner contre l'ancien propriétaire de ce bien qu'ils avaient acquis aux enchères, à la valeur des biens en cause et à la faible importance de l'empiétement subsistant, M. Z... ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit des consorts X... et Y... à jouir de leur domicile en demandant la liquidation de cette astreinte au motif qu'un empiétement minime demeurait sur son fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 54 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ainsi que des articles 545 du code civil et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

Mais attendu que le juge, saisi d'une demande de liquidation d'une astreinte prononcée par une décision irrévocable, tient de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution la seule mission de vérifier l'exécution de l'obligation de démolition sans pouvoir modifier celle-ci ; qu'ayant constaté la subsistance de points d'empiétement justifiant la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Cour de cassation, chambre civile 3
Audience publique du jeudi 21 décembre 2017, n° de pourvoi: 16-25406
Publié au bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 3 novembre 2015), que M. X..., propriétaire d'une parcelle, a assigné M. Y... et Mme Z..., propriétaires de la parcelle contiguë, en démolition de la partie d'un bâtiment et de murs de clôture édifiés par ceux-ci et empiétant sur son fonds ;

Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... et Mme Z... font grief à l'arrêt d'accueillir la demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient au juge d'apprécier la proportionnalité d'une sanction en ayant égard à ses conséquences et aux intérêts et droits en présence ; qu'en condamnant les consorts Y...- Z... à démolir toutes constructions qu'ils avaient édifié sur leur parcelle qui empiétaient sur le fonds X... sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si une telle sanction n'était pas disproportionnée eu égard au caractère minime de l'empiétement en cause et à la circonstance que la démolition se rapportait notamment au mur porteur d'une maison d'habitation, quand un dédommagement financier était concevable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 545 du code civil ;
2°/ que le droit au respect des biens protégé par l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales implique que la démolition d'une construction ne peut être ordonnée que si elle n'est pas manifestement disproportionnée au but légitime poursuivi ; qu'en ordonnant la destruction des constructions réalisées par les consorts Y...- Z... aux motifs inopérants que l'empiétement consistant à ne pas respecter le bien d'autrui, c'était M. X... qui était fondé à se prévaloir de cette disposition et non les auteurs de l'empiétement, sans rechercher si la démolition des constructions n'était pas manifestement disproportionnée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention précitée ;
3°/ que nul ne peut user de son droit de propriété de façon abusive ; qu'en condamnant consorts Y...- Z... à la démolition de toute construction empiétant sur le fonds X... sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la persistance de M. X... à solliciter une telle sanction en dépit du caractère très minime de l'empiétement et de l'absence de gêne occasionnée, ne procédait pas d'une malveillance et d'un acharnement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 545 du code civil ;
4°/ que M. X... avait adopté un comportement fautif en s'abstenant, lors de l'implantation du mur de clôture et du bâtiment, de signaler à aux consorts Y...- Z... éventuel empiétement sur sa parcelle 5072- DO, en attendant que la construction soit achevée pour faire état de cet empiétement et en refusant ensuite toute solution amiable au conflit ; qu'ainsi, ces fautes lui interdisaient de solliciter une démolition disproportionnée à l'empiétement, eu égard notamment au caractère minime de cet empiétement et à la bonne foi des consorts Y...- Z... ; que l'arrêt a donc violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'article 545 du même code ;

Mais attendu que tout propriétaire est en droit d'obtenir la démolition d'un ouvrage empiétant sur son fonds, sans que son action puisse donner lieu à faute ou à abus ; que l'auteur de l'empiétement n'est pas fondé à invoquer les dispositions de l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'ouvrage qu'il a construit méconnaît le droit au respect des biens de la victime de l'empiétement ; que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches inopérantes, a décidé à bon droit d'ordonner la démolition de la partie du bâtiment et des murs édifiés par M. Y... et Mme Z... et empiétant sur le fonds de M. X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;


Cour de cassation chambre civile 3
Audience publique du jeudi 17 mai 2018, n° de pourvoi: 16-15792
Publié au bulletin Rejet


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 11 janvier 2016 ), que M. et Mme X... ont assigné M. Z... en revendication de la propriété, par prescription trentenaire, de la parcelle qu'ils occupaient et sur laquelle ils avaient construit leur maison ; que M. Z..., se prévalant d'un titre de propriété, a demandé la libération des lieux et la démolition de la maison ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt d'accueillir les demandes de M. Z..., alors, selon le moyen, que le droit au domicile est une composante du droit à la vie privée dont le respect est protégé par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'ingérence dans ce droit doit demeurer proportionnée au but légitime poursuivi ; que, pour apprécier la proportionnalité de la perte d'un logement, qui est l'une des atteintes les plus graves au droit au respect du domicile, il y a lieu de tenir compte notamment de l'ancienneté de l'occupation des lieux et de la situation particulière de la personne concernée, qui commande une attention spéciale si elle est vulnérable ; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué avait relevé que M. X... avait construit sur le terrain litigieux une maison depuis plus de vingt ans, dans laquelle il vivait avec son épouse, décédée durant l'instance d'appel ; qu'il ressortait également des documents de la cause que M. X... était âgé de plus de 87 ans, ce qui le rendait particulièrement vulnérable ; qu'en ordonnant néanmoins à M. X... de quitter la parcelle sur laquelle il avait établi son domicile et d'y démolir les constructions qui lui servaient de logement, sans rechercher si ces mesures étaient proportionnées au regard notamment de l'ancienneté de l'occupation des lieux et de l'âge de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que les mesures d'expulsion et de démolition d'un bien construit illégalement sur le terrain d'autrui caractérisent une ingérence dans le droit au respect du domicile de l'occupant, protégé par l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Qu'une telle ingérence est fondée sur l'article 544 du code civil, selon lequel la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, et sur l'article 545 du même code, selon lequel nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité ;

Qu'elle vise à garantir au propriétaire du terrain le droit au respect de ses biens, protégé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et par l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Que, l'expulsion et la démolition étant les seules mesures de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien, l'ingérence qui en résulte ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l'atteinte portée au droit de propriété ;

Attendu qu'ayant retenu qu'il résultait d'un acte notarié de partage du 20 mai 2005 que M. Z... était propriétaire de la parcelle litigieuse et que M. et Mme X... ne rapportaient pas la preuve d'une prescription trentenaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

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