SEANCE N°7 : USUFRUIT ET DROITS
VOISINS
Usufruit ou autre droit réel de jouissance
Commentaire
Cass.
civ. 3ème, 23 mai 2012, quelle
est la qualification du droit au bois crû et à croître ?
Cass.
civ. 3ème, 31 octobre 2012, quelle
est la qualification de la convention d’occupation ?
Cass.
civ. 3ème, 28 janvier 2015, quel
est le régime du droit d’usage du transformateur ?
Cass.
civ. 3ème, 7 juin 2018, quel
est le régime du droit d’usage d’un lot de copropriété ?
Cour de
cassation chambre civile 3,
Audience
publique du mercredi 23 mai 2012, n° de pourvoi: 11-13202
Publié au
bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Donne acte aux consorts X... du désistement de leur pourvoi
en ce qu'il est dirigé contre la société Groupement foncier agricole du Crêt du
Merle et la commune de la Pesse ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 16 décembre 2010) que
les consorts X..., propriétaires d'une exploitation agricole de montagne ont
été assignés par M. Y..., propriétaire d'un domaine agricole en revendication
de deux cantons de bois " crû et à croître " situés sur la parcelle
dont le sol leur appartenait ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt
d'accueillir cette demande alors, selon le moyen que le droit dit de crû et à
croître, droit d'exploiter des arbres situés sur le sol d'un fonds appartenant
à un tiers, est un simple droit réel de jouissance démembré de la propriété de
ce fonds et s'éteint en conséquence par un non-usage trentenaire ; qu'en
retenant au contraire que ce droit investissait son titulaire de la pleine
propriété des arbres concernés et qu'il ne s'éteignait dès lors pas par un
non-usage trentenaire, la cour d'appel a violé, par fausse application,
l'article 544 du code civil ;
Mais attendu que les propriétés des consorts X... et de M.
Y... avaient une origine commune remontant à l'acte de partage du 12 juin 1837,
qui avait attribué à Joseph-Marie Z..., auteur de M. Y..., un lot comprenant
deux cantons de bois, crû et à croître à perpétuité, morts et vivants, pris sur
le sol d'un lot réservé à Jean-Marie Z..., auteur des consorts X..., et que ce
droit était invariablement mentionné dans tous les actes subséquents au profit
des successeurs de Joseph-Marie Z..., la cour d'appel en a exactement déduit
que la prérogative ainsi concédée sur la parcelle litigieuse était perpétuelle
et ne pouvait s'éteindre par le non-usage trentenaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen,
pris en sa seconde branche, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission
du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Cour de
cassation chambre civile 3,
Audience
publique du mercredi 31 octobre 2012 , n° de pourvoi: 11-16304
Publié au
bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen :
Vu les articles 544 et 1134 du code civil ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le propriétaire peut
consentir, sous réserve des règles d'ordre public, un droit réel conférant le
bénéfice d'une jouissance spéciale de son bien ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 février 2011), que
par acte notarié des 7 avril et 30 juin 1932, la fondation La Maison de Poésie
a vendu à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (la SACD), un
hôtel particulier, l'acte mentionnant que "n'est toutefois pas comprise
dans la présente vente et en est au contraire formellement exclue, la
jouissance ou l'occupation par La Maison de Poésie et par elle seule des locaux
où elle est installée actuellement et qui dépendent dudit immeuble" et
"au cas où la SACD le jugerait nécessaire, elle aurait le droit de
demander que le deuxième étage et autres locaux occupés par La Maison de Poésie
soient mis à sa disposition, à charge par elle d'édifier dans la propriété
présentement vendue et de mettre gratuitement à la disposition de La Maison de
Poésie et pour toute la durée de la fondation, une construction de même
importance, qualité, cube et surface pour surface" (...) "en
conséquence de tout ce qui précède, La Maison de Poésie ne sera appelée à
quitter les locaux qu'elle occupe actuellement que lorsque les locaux de
remplacement seront complètement aménagés et prêts à recevoir les meubles,
livres et objets d'art et tous accessoires utiles à son fonctionnement,
nouveaux locaux qu'elle occupera gratuitement et pendant toute son
existence" ; que, le 7 mai 2007, la SACD a assigné La Maison de Poésie en
expulsion et en paiement d'une indemnité pour l'occupation sans droit ni titre
des locaux ;
Attendu que pour accueillir la demande l'arrêt retient que
le droit concédé dans l'acte de vente à La Maison de Poésie est un droit
d'usage et d'habitation et que ce droit, qui s'établit et se perd de la même
manière que l'usufruit et ne peut excéder une durée de trente ans lorsqu'il est
accordé à une personne morale, est désormais expiré ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les parties étaient
convenues de conférer à La Maison de Poésie, pendant toute la durée de son
existence, la jouissance ou l'occupation des locaux où elle était installée ou
de locaux de remplacement, la cour d'appel, qui a méconnu leur volonté de
constituer un droit réel au profit de la fondation, a violé les textes susvisés
;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les
autres moyens :
CASSE ET ANNULE,
Cour de
cassation chambre civile 3,
Audience
publique du mercredi 28 janvier 2015, n° de pourvoi: 14-10013
Publié au
bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 544, 619, 625 et 1134 du code civil ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le propriétaire peut
consentir, sous réserve des règles d'ordre public, un droit réel conférant le
bénéfice d'une jouissance spéciale de son bien ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 29 octobre 2013), que
par acte du 28 avril 1981, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble 11 rue
de la Halle aux Toiles à Alençon (le syndicat) a constitué, au bénéfice de la
société EDF devenue ERDF, un droit d'usage sur un lot composé d'un
transformateur de distribution publique d'électricité ; que le syndicat a
assigné la société ERDF pour faire constater l'expiration de la convention de
droit d'usage à la date du 28 avril 2011 et ordonner la libération des lieux ;
Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt retient que la
constitution de ce droit d'usage a été consentie et acceptée moyennant paiement
d'un prix, que ni le règlement de copropriété ni l'acte du 28 avril 1981 ne
fixent de durée au droit d'usage convenu et que ces actes instituent et
réglementent un droit réel de jouissance spéciale exclusif et perpétuel en
faveur d'un tiers ;
Qu'en statuant ainsi alors que, lorsque le propriétaire
consent un droit réel, conférant le bénéfice d'une jouissance spéciale de son
bien, ce droit, s'il n'est pas limité dans le temps par la volonté des parties,
ne peut être perpétuel et s'éteint dans les conditions prévues par les articles
619 et 625 du code civil, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE,
Cour de
cassation chambre civile 3,
Audience
publique du 7 juin 2018, 17-17.240
Publié au
bulletin
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu
l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 21 mars 2017),
que la SCI L'Aigle blanc (la SCI) a acquis, en 2004, divers lots à vocation
commerciale, dont un à usage de piscine, faisant partie d'un immeuble en
copropriété ; que les vendeurs avaient signé, le 20 août 1970, une
convention "valant additif" au règlement de copropriété par
laquelle ils s'engageaient à assumer les frais de fonctionnement de la piscine
et à autoriser son accès gratuit aux copropriétaires, au moins pendant la
durée des vacances scolaires ; qu’un arrêt devenu définitif, déclarant
valable cette convention, a condamné la SCI à procéder, dans les termes de
celle-ci, à l'entretien et à l'exploitation de la piscine ; que la SCI a
alors assigné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Grand
Roc en constatation de l’expiration des effets de cette convention à compter
du 20 août 2000 ;
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de rejeter
cette demande, alors, selon le moyen que les engagements perpétuels sont
prohibés, le caractère perpétuel s’appréciant in concreto, en la personne
du débiteur de l’engagement ; que si le propriétaire peut consentir, sous
réserve des règles d’ordre public, un droit réel conférant le bénéfice
d’une jouissance spéciale de son bien, ce droit ne peut être perpétuel et
s’éteint, s’il n’est pas limité dans le temps par la volonté des parties,
dans les conditions prévues par les articles 619 et 625 du code civil ; qu’en
retenant que les droits et obligations contenues dans la convention du 20 août
1970 n’étaient pas perpétuels, tout en constatant que ceux-ci s’exerceront
tant que les copropriétaires n’auront pas modifié le règlement de
copropriété et que l’immeuble demeurera soumis au statut de la copropriété,
ce dont il résultait que ces droits et obligations avaient une durée
indéterminée et présentaient donc, pour le propriétaire des lots grevés
desdites obligations, un caractère perpétuel, la cour d’appel a violé
l’article 1210 du code civil, ensemble les articles 619 et 625 du code civil ;
Mais attendu qu’est perpétuel un droit réel attaché à un
lot de copropriété conférant le bénéfice d'une jouissance spéciale d’un
autre lot ; que la cour d’appel a retenu que les droits litigieux, qui avaient
été établis en faveur des autres lots de copropriété et constituaient une
charge imposée à certains lots, pour l'usage et l'utilité des autres lots
appartenant à d'autres propriétaires, étaient des droits réels sui generis
trouvant leur source dans le règlement de copropriété et que les parties
avaient ainsi exprimé leur volonté de créer des droits et obligations
attachés aux lots des copropriétaires ; qu’il en résulte que ces droits sont
perpétuels ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués,
l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision
spécialement motivée sur les autres branches du moyen qui ne sont manifestement
pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
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