La formation des actes de commerce en code de commerce

 

Section 1 : La formation des actes de commerce.

 

3 aspects. Idée générale est que l’acte de commerce est soumis lors de sa formation au droit commun des obligations et notamment ART 1101 et suivants du code civil.

Toutefois, on a trois domaines qui se distinguent du droit commun des obligations :

 

§1. La capacité.

 

ART 1129 et 1145 du code civil qui exigent la capacité juridique de ceux qui contractent des actes juridiques. Il existe deux causes d’incapacité de conclure des actes juridiques et notamment des actes de commerce :

 

-     La minorité

-     Altération de la faculté mentale des majeurs> le droit commercial ne prévoit pas de règles spécifiques.

 

En revanche on va s’intéresser aux mineurs puisqu’il existe des règles propres au droit commercial.

L’idée gouvernant la matière a évolué selon 3 phases :

 

> Avant la loi du 5 juillet 1974 qui a abaissé l’âge de la majorité à 18 ans. L’idée est que le mineur émancipé pouvait passer des actes de commerce, exercer une activité commerciale.

> Avec cette loi on n’a plus estimé utile de permettre au mineur émancipé d’exercer une activité commerciale.

>Loi du 15 juin 2010 qui est venue consacrer l'EIRL est revenu au système antérieur à la loi de 1974 puisque cette loi a modifié les ART L121-2 du code de commerce ainsi que l’ART 413-8 du code civil. Désormais, le mineur émancipé peut être commerçant de deux manières :

-     Autorisation du juge des tutelles au moment de la décision de l’émancipation

-     Postérieurement s’il est autorisé par le président du tribunal judiciaire.

 

Une exception à ce principe doit être relevé qui concerne un domaine assez strict qui est celui concernant la lettre de change puisqu’il résulte de l’ART L511-5 du code de commerce qu’un mineur même émancipé et ayant été autorisé à devenir un commerçant ne peut être signataire d’une lettre de change.

Enfin, un mineur non émancipé même représenté ne peut exercer une activité commerciale, il n’a pas la capacité commerciale ART 509 du code civil dispose que son représentant légal ne peut même avec l’autorisation exercer le commerce au nom du mineur.

Les actes juridiques passés par un mineur incapable parce que non émancipé, peuvent être annulés ou rescindés pour cause de lésion dans les conditions prévues ART 1149 du code civil.

 

§2. Le consentement.

 

A)    Son obtention.

 

Les actes de commerce comme tout acte de droit civil supposent pour leur validité le consentement de la partie qui s’oblige. Il n’existe pas de règles spéciales en matière d’acte de commerce. Toutefois, le droit commun des contrats s’inspire des solutions conçues par le droit commercial. On retrouve cette influence du droit commercial sur le consentement de droit commun à travers une règle en vertu de laquelle en droit commercial, le silence vaut acceptation dès lors que le comportement de la partie qui se tait (taiseuse) est dépourvu d’ambiguïté et qu’il apparait acquis qu’elle a entendu le contrat se former.

 

Par ex : lorsque deux commerçants sont en relation d’affaire habituelle le fait de recevoir sans protester une livraison et la facture qui l’accompagne, a toujours suffis à former le contrat et à obliger à payer le prix même s’il n’y a pas de commande formelle expresse.

 

Avant l’ordonnance du 10 février 2016 le principe du droit commun était que le silence ne valait pas acceptation. Désormais, certes le droit civil continue à poser en principe que « le silence ne vaut pas acceptation » ART 1120 du code civil mais le même article précise « à moins qu’il n’en résulte autrement de la loi, des usages, des relations d’affaires ou de circonstances particulières. »

 

Ce nouvel article introduit par l’ordonnance de 2016 transforme en règle générale valant pour tous les contrats une solution qui a d’abord été consacrée par la jurisprudence dans les relations commerciales.

 

B)     Sa forme.

 

Traditionnellement on affirme que le droit commercial est hostile à toute règle de forme. En réalité, le droit commercial est fréquemment formaliste pour la raison suivante : dans l’objectif de sécuriser les relations contractuelles, de protéger les tiers.

C’est pourquoi le droit commercial va exiger un écrit, une publicité dans certains domaines.

 

Par ex : en droit des sociétés commerciales les statuts des sociétés doivent être rédigés par écrit et ces statuts doivent être déposés au greffe, publiés et d’ailleurs c’est l’immatriculation de la société qui confère la personnalité morale à la société.

 

Toutefois, la tendance récente du législateur est de simplifier le droit des sociétés avec des lois de simplification et la dernière en date est la loi du 19 juillet 2019 qui est dite loi Soilihi qui supprime un formalisme lourd qui étaient les 5 mentions obligatoires dans l’acte de cession de fonds de commerce contenues dans l’ART L141-1 du code de commerce.

Les praticiens paradoxalement continuent à inscrire dans l’acte de vente de fonds de commerce ces mentions qui ont été supprimées sur le fondement de l’ART 1112-1 du code civil qui impose le devoir d’information.

 

§3. La preuve des actes de commerce.

 

En pratique si on n’a pas de preuve notre prétention a peu de chance d’aboutir.

 

A)    Un principe de liberté.

 

En droit civil la preuve n’est pas libre, si les faits juridiques peuvent se trouver par tous moyens, les actes juridiques en revanche qui mettent en jeu un intérêt supérieur à 1500 € doivent être prouvés au moyen d’un écrit pré-constitué ART 1359 du code civil qui l’exige.

 

Sur ce point le droit commercial se démarque du droit civil en instituant un régime de liberté de la preuve. ART L110-3 du code de commerce « à l’égard des commerçants les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu’il n’en soit disposé autrement par la loi. »

Cette solution se justifie par le besoin de favoriser la conclusion rapide et sans formalisme des actes de commerce qui sont le support de l’activité économique.

 

On le voit, la liberté de la preuve ne vaut qu’à raison de qualité de commerçant de l’une des parties, ce n’est donc pas la preuve des actes de commerce qui est libre mais la preuve des obligations commerciales d’un commerçant.

Il en résulte qu’un acte de commerce passé par un non commerçant par ex la cession de contrôle de parts sociales par un associé, se prouve selon les règles civiles. Il en va de même de l’acte passé par un commerçant en dehors de l’exercice de sa profession.

 

En vertu de l’ART L110-3 du code de commerce la règle de la liberté de la preuve ne s’applique qu’en l’absence de dispositions spéciales contraires. Certains textes dérogent à ce principe et imposent la rédaction d’un écrit. ART L142-3 du code de commerce exige un écrit pour le nantissement d’un fonds de commerce. Le contrat de société aussi exige un écrit soumis à certaines formalités.

 

B)     Les conséquences de la liberté de la preuve.

 

            L’idée générale.

 

Dire que la preuve est libre en matière commerciale signifie que toutes les règles du système de la preuve en matière civile sont non avenues.

 

            Illustrations.

 

*  Pas de distinction selon l’enjeu financier, selon que l’acte que l’on doit prouver porte sur un intérêt supérieur à 1500€, si passé par un commerçant il peut être prouvé par tous moyens peu importe l’enjeu financier.

 

Ces moyens peuvent être :

-     L’aveu

-     Écrit

-     Serment probatoire

-     Témoignage

 

Indice de toute nature et d’une manière générale tous les documents qui ne pourraient être en principe admis par le juge civil tels que les micro films, les photocopies, les fax, les courriels, les textos…

 

*  Contrairement au principe en vertu duquel le plaideur ne peut se constituer de preuve à lui-même le commerçant pourra se prévaloir de sa propre comptabilité arrêt du 12 octobre 1982 de la chambre commercial.

 

ART L123-23 du code de commerce dispose que « la comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre commerçants pour faits de commerce »

 

Elle pourra aussi lui être opposée la production de documents comptables pouvant même être ordonnés en justice. Le juge peut en effet être saisi par les associés qui souhaitent avoir connaissance de comptabilité pas déposée et peuvent demander au juge qu’il ordonne la remise de production de cette comptabilité.

 

*  Principe d’équivalence des modes de preuve : pas de hiérarchie entre ces derniers. La domination de l’écrit ne vaut plus en matière commerciale, lorsqu’un écrit est produit par l’une des parties, il n’a pas une valeur supérieure aux autres modes de preuve invoqués par son contradicteur.

Arrêt du 21 novembre 1995 estime qu’il est possible de prouver contre et outre le contenu d’un écrit par le témoignage des présomptions.

 

*  Exclusion de l’ART 1375 du code civil. En d’autres termes, en droit commercial en vertu du principe de la liberté de la preuve, la règle du double original de cet article ne s’applique pas aux contrats synallagmatiques passés par les commerçants. Cet article exige que l’acte sous seing privé soit fait en autant d’orignaux qu’il existe de parties au contrat alors que si un contrat commercial est rédigé par écrit un seul exemplaire suffis.

 

*  ART 1376 du code civil ne s’applique pas non plus en raison de la liberté de la preuve. Il postule l’obligation de faire figurer la signature de celui qui s’engage à la mention écrite par lui même de la somme de la quantité due en toutes lettres et en chiffres dans les actes unilatéraux comportant un engagement de payer une somme d’argent ou de livrer un bien fongible.

 

C’est ainsi que le cautionnement souscrit par un commerçant et affranchi de l’exigence de la mention de l’ART 1376arrêt du 11 décembre 1990. Cette mention est maintenue en présence du cautionnement commercial souscrit par un non commerçant. Quant au cautionnement dit intéressé c'est à dire le cautionnement passé par le dirigeant d’une société commerciale, il n’est en principe pas commerçant donc ce sont les règles civiles qui devraient s’appliquer.

Mais la jurisprudence accepte que cet acte même irrégulier constitue un commencement de preuve par écrit dès lors qu’il est conforté par un indice concordant telle que la place/fonction du dirigeant dans la société >Arrêt du 15 octobre 1991. 

 

*  ART 1377 du code civil que l’on ne va pas non plus appliquer. Il prévoit qu’un acte n’acquiert une date certaine que par 3 modes :

-     l’enregistrement

-     le décès de l’une des parties

-     la constatation par un acte authentique.

La jurisprudence estime que cet article ne s’applique pas arrêt du 25 avril 1983 qui décide qu’un preneur (locataire commercial) est en droit d’opposer son bail commercial qui n’a pas acquis une date certaine à un autre preneur lui-même commerçant qui bénéficiait d’un bail, portant sur la même chose, consenti postérieurement mais enregistré.

 

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